Solweig,étudiante en lettres,a abandonné la fac à la suite du décès de sa mère et de l'accident qui a laissé son père inconscient.Elle doit élever seule son petit frère et a pris un emploi de caissière dans un supermarché.Pour évacuer le stress de sa vie désespérante,elle s'est mise à rédiger un blog où elle raconte la pénibilité du travail dans la grande distribution.Ses écrits connaissent un succès inattendu et provoquent des mouvements sociaux chez les employées du secteur,ce qui fait de la jeune femme,jusqu'ici réfugiée dans l'anonymat,la cible des patrons de magasins et de la presse,tous voulant découvrir son identité.En 88 le groupe nantais Elmer Food Beat sortait une chanson intitulée "La caissière de chez Leclerc",qui disait en substance "je la prendrais bien sauvagement au bord du tapis roulant,quand je la vois moi j'ai la trique,je la passerais bien au rayon optique".Il se trouve que le film adapte le livre autobiographique d'Anna Sam,qui fut justement caissière dans un centre Leclerc de 2000 à 2008 et a effectivement tenu un blog racontant ses tristes aventures.Ceci dit cette enseigne n'est pas particulièrement en cause,c'est pareil partout.Il est juste amusant de constater que la boîte du si sympathique Michel-Edouard,qui brandit son humanisme de choc dans les médias,ne vaut pas mieux que les autres.Il s'agit là du premier et seul film réalisé par Pierre Rambaldi,également producteur avec sa société Big World,qui est le frère de Julien Rambaldi,réalisateur de la comédie "Les meilleurs amis du Monde",et d'Emmanuel Rambaldi qui signe la musique du film.Le scénario est écrit par Michel Siksik,qui est aussi acteur dans le film.Autant le dire,c'est passablement raté,et c'est d'autant plus regrettable qu'il y avait matière à faire un grand film social.Les problèmes évoqués dans le film sont bien réels,les "hôtesses de caisse" comme on les nomme si élégamment,faisant partie des esclaves du monde moderne capitaliste au même titre que beaucoup de salariés d'autres professions.Salaires de misère,horaires à la con,travail physiquement éprouvant et répétitif,mépris généralisé,pressions et humiliations de la hiérarchie et toutes sortes de clients plus ou moins agressifs à gérer,il faut vraiment en avoir cruellement besoin pour exercer ce métier.Ce n'est pas toujours aussi ignoble que ce que décrit le film mais ça y ressemble souvent.Cela posé,le traitement appliqué à cette histoire par les auteurs s'éloigne du livre,s'éloigne du sujet de fond et aligne un paquet de scènes outrancières ridicules tirant sur la caricature.Sans grande cohérence le récit s'éparpille et se trouve parasité par une romance niaise et vaseuse entre l'héroïne et un jeune comédien.Alors qu'on est sensé être dans un cadre hyperréaliste,rien n'apparait crédible,ni les dialogues,ni les réactions des personnages,ni leur caractérisation,le tout étant de surcroît noyé sous l'immonde tapage sonore de Manu Rambaldi qui tient plus du terrorisme auditif que de la musique,en voilà un qui a de la chance d'avoir des frères pour l'embaucher,et une voix off envahissante débitant ce qui semble être des extraits assez pompeux du livre .Au fil de séquences stupides poussivement exagérées,le film s'achemine cahin-caha vers un happy-end aussi attendu que crétin.Dommage pour la "grande distribution" ici réunie,à commencer par l'invariablement magnifique Déborah François,aussi belle que douée,qui est décidément capable de tout jouer et restitue à merveille les tourments intérieurs d'une jeune femme courageuse et résiliente.Elle est entourée d'une jolie bande de caissières comprenant l'adorablement spontanée Alice Belaïdi,l'empathique Firmine Richard et une Elsa Zylberstein subtile en journaliste infiltrée culpabilisant de devoir balancer une collègue à qui elle s'est attachée.Le belge fou Jean-Luc Couchard est excellent mais son rôle de petit chef tyrannique,mesquin,sadique et libidineux est vraiment trop chargé pour convaincre.Si Nicolas Giraud en amoureux transi est d'une remarquable insignifiance,Gilles Cohen est encore une fois impeccable en ami fidèle.Beaux numéros également de Michel Siksik,le scénariste,en vieux chef de rayon râleur,Zacharie Chasseriaud en ado ingérable et Marc Lavoine,qui était dans "Les meilleurs amis du Monde",en patron de presse sans états d'âme totalement glaçant.Parmi les clients allumés qui passent à la caisse on distingue Camille Chamoux en mère aux réflexions déplacées,Françoise Bertin en mamie Carte Bleue,Tania Garbarski en dame cultivée et Alban Ivanov en paparazzi,tandis qu'Anna Sam revient pour l'occasion derrière la caisse.Le comédien belge au nom grec Marcos Adamantiadis a un tout petit rôle,comme dans "Un heureux évènement" sorti la même année et dans lequel on voyait aussi Firmine Richard.