Entre deux mondes
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J'ai l'impression que plus la carrière de Steve McQueen avance, plus celui-ci devient consensuel, sans pour autant se renier. D'ailleurs, ses trois derniers films m'ont plu, preuve que je reste toujours sensible à son style. Il faut dire qu'il y avait une sacrée équipe réunie ici : McQueen, donc, mais aussi la brillante Gillian Flynn au scénario, l'excellente Lynda La Plante pour le roman d'origine et un casting de premier ordre : autant dire qu'une déception aurait été une grosse... déception. Alors c'est vrai : il y a des failles, notamment dans le scénario. Que ce soit
le casse final, paraissant presque « facile »,
certains éléments qui auraient gagné à être plus développés ou d'autres pas très clairs, on peut nourrir quelques regrets.
On sent que le réalisateur veut aller à toute vitesse, ne prenant pas le temps de s'arrêter sur des passages pourtant importants pour la compréhension et la densité du récit. Pour autant, il serait vraiment dommage de se limiter à ces quelques bémols, car niveau intensité, personnages marquants et plongée fort peu reluisante dans le milieu politique, c'est du lourd. Quelle maîtrise ! À défaut d'avoir su rendre son scénario limpide, au moins sait-il le mener de main de maître tant nombre de scènes en imposent, la qualité très sûre des dialogues et cette capacité à rendre chaque protagoniste intéressant, complexe, presque ambigu, c'est vraiment fort. Du début à la fin j'ai été dedans, bluffé par la capacité du cinéaste à s'adapter aux codes du polar tout en gardant ses caractéristiques habituelles : sobriété, émotion contenue, impeccable direction d'acteurs...
Là encore, c'est du tout bon : Viola Davis confirme sa présence hors-norme, Michelle Rodriguez assure mais la vraie révélation est clairement Elizabeth Debicki, ne m'ayant jamais spécialement marqué et ici remarquable. Les seconds rôles sont également à leur avantage : Brian Tyree Henry, Daniel Kaluuya, Robert Duvall et Liam Neeson sont presque au diapason, avec une légère préférence pour un Colin Farrell que l'on n'avait pas vu aussi inspiré depuis longtemps. Ces magouilles politiciennes où tout ce petit monde patauge joyeusement sont un vrai plus pour l'œuvre, donnant un contexte réaliste et social à un polar qui ne manquait déjà pas de force. Donc, oui, même si c'est un peu improbable et pas toujours assez creusé, « Les Veuves », ça reste du vrai cinéma : percutant, réalisé dans les règles de l'art et nous tenant en haleine du début à la fin aussi bien par ses enjeux que ses héroïnes : plus « grand public », sans doute, mais toujours aussi doué, le Steve McQueen.
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Créée
le 14 déc. 2018
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