Au début du XXème siècle, une adolescente viennoise tombe amoureuse d'un célèbre pianiste qui a emménagé près de chez elle. Pendant des années, elle rêve de lui matin, midi et soir, mais le musicien mène une vie trépidante et n'a même pas idée de son existence. Une fois parvenue à l'âge adulte, elle prend son courage à deux mains et se décide enfin à l'aborder. Pour elle, ce sera l'aboutissement d'un fantasme et le début d'une grande histoire d'amour. Pour lui, ce ne sera qu'une aventure d'un soir, aussi vite consommée, aussi vite oubliée... Manque de chance, un enfant naîtra de cette union, et la belle Lisa décidera d'en cacher l'existence à son géniteur. Quelques années plus tard, les deux amants vont se recroiser par le plus grand des hasards. La passion d'antan renaîtra-t-elle de ses cendres ?

Largement considéré comme le chef d'œuvre de Max Ophüls, ce film plaira aux plus romantiques d'entre vous. Aussi étonnant que celui puisse sembler, Joan Fontaine est aussi crédible en adolescente pétrie d'amour qu'en mère de famille proche de la trentaine, et je peux vous assurer qu'il ne s'agit pas que d'une question de maquillage. Le couple qu'elle forme avec Louis Jourdan fonctionne parfaitement, et j'ai eu autant de plaisir à observer les balbutiements de leur relation que leurs retrouvailles impromptues dans les couloirs d'une salle de concert.

Louis Jourdan, bien que moins présent à l'écran, fait également très bonne figure dans ce rôle de virtuose incapable de prendre son destin en main. Ses traits s'assombrissent au cours du film, et on le voit littéralement passer d'un extrême à l'autre : si au début de l'intrigue il incarne le playboy riche, beau et célèbre à qui tout sourit, 10 ans plus tard, ce n'est plus qu'un pleutre pathétique qui a perdu le fil de sa vie à cause de ses nombreux excès.

Maîtrisant son film sur le bout des doigts, Max Ophüls s'amuse avec la caméra et à plusieurs reprises, il s'évertue à recréer scrupuleusement les mêmes scènes dans un contexte temporel différent, histoire de nous montrer que la vie n'est qu'un éternel recommencement. Cette juxtaposition des plans donne à la "Lettre d'une inconnue" une dimension tragique insoupçonnée, et lorsque tous les éléments du scénario finissent par s'imbriquer les uns dans les autres lors des 5 dernières minutes, on ne peut que saluer le réalisateur pour cette si grande attention qu'il a accordée aux plus petits détails.

Au final, si cette nouvelle de Stefan Zweig a été admirablement transposée à l'écran, ses personnages restent toutefois un peu trop stéréotypés pour être pris pleinement au sérieux : à en croire l'auteur, seules les femmes croient à l'amour, les hommes préférant quant à eux batifoler pour éviter toutes contraintes et responsabilités. Un peu simpliste, non ?
chtimixeur
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le 24 janv. 2012

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