Leurs enfants après eux est une adaptation du roman du même nom de Nicolas Mathieu.
Leurs enfants après eux traite de l’autorité de l’adulte sur ces adolescents qui grandissent dans les années 90 auprès de parents plus ou moins défaillants, voire démissionnaires. Ma mère aimait à me répéter que « les parents ne naissent pas avec le mode d’emploi pour être un bon parent », et ce film illustre parfaitement cette idée. Les parents, dépassés pour la plupart, tentent d’élever leurs enfants à Heillange dans la « Vallée de la Henne» en Moselle, vallée frappée par la crise de la sidérurgie en Lorraine. À l’instar de la mère d’Anthony qui renonce à toute forme d’autorité sur son fils, ou du père d’Anthony, qui lui use de la violence pour assoir cette autorité, au même titre que le père d’Hassine. Le cousin n’est pas en reste puisque sa mère, bipolaire, est présente physiquement mais inexistante dans la vie des jeunes. Ces comportements adultes façonnent les enfants, et ce qui reste de ces enfants est aussi modelé par les jeux de pouvoir qui s’exercent dans toutes les sphères de leur vie : au sein de la sphère familial où les parents assoient (ou tentent d’asseoir) leur autorité par n'importe quel moyen, dans la sphère publique où la rue est régit par la loi du plus fort (avec les petits caïds qui exécutent leur propre loi en volant notamment la mobylette du père d’Anthony, ce qui est finalement le déclencheur d’une longue série d’évènements marquants), et même dans la sphère intime où les relations amoureuses sont aussi soumises à la concurrence et aux aspirations déçues. C’est une suite de rendez-vous manqués : entre deux amoureux, entre un père et son fils, entre un mari et sa femme.
Le film est empreint d’une douceur et d’une tendresse paradoxale, qui tranche avec les évènements qui sont montrés à l’écran. Le film est très inscrit dans la réalité sociale : la coupe du monde 98, la mixité sociale, les études des jeunes, le bal du 14 juillet, etc. Sur cette toile de fond, on assiste aux premiers émois adolescents dans la torpeur d’un été où les jeunes essaient d’échapper à l’ennui, à un balais de personnes qui s’aiment, sans savoir comment se le montrer ni comment se le dire. J’ai trouvé le film très contemplatif (peut-être un peu long, mais cette lenteur colle plutôt bien à la langueur estivale) sans réelle intrigue, il s’agit plutôt d’une histoire de vies et de destins croisés qu’on prend plaisir à suivre. La musique (qui est incroyable) et la photo un peu grainée ancrent très bien le film dans son époque
Gille Lellouche est magistral dans le rôle de ce père qui ne sait pas exprimer ses sentiments, ni envers sa femme, ni envers son fils, autrement qu’avec violence. Je suis un peu moins fan du jeu de Paul Kircher (que j’avais déjà vu dans Le Règne animal) que j'aimerais voir sortir de sa "coquille". .