Ça y est. Paul Thomas Anderson a son Once Upon a time in Hollywood ;douce nostalgie d'une époque effleurée mais jamais pleinement vécue, fétichisme de cinéaste pur, comme déconnecté du réel et pourtant sans cesse rattrapé par son désir de s'inscrire dans l'Histoire. PTA filme les 70s encore naissante, une époque où l'on tombe amoureux sur un coup de tête, où l'apocalypse a les traits d'une crise pétrolière, où l'homme est un mixte de ce qui fera le pire du capitalisme contemporain (voir des occasions commerciales partout, foncer tête baissée sans conscience mais avec gouaille) et d'une certaine vibe hippie post-Vietnam.
Le réalisateur retrouve la mélancolie légère et bizarre de Punch Drunk Love, mais, transportée dans les Seventies, son histoire d'amour juvénile et estivale, maladroite et candide semble une excuse pour faire tout autre chose : dresser une galerie de portraits et une accumulation de saynètes peuplées de weirdos et noyées dans une succession inarrêtable de chansons, occasion rêvée d'y glisser des caméos à tout va, d'acteurs qui disparaîtront aussi subrepticement qu'ils sont arrivés.
Dans sa démarche presque autistique, PTA, disciple de Scorsese arrivé trop tard (certaines scènes sont trop grosses pour ne pas être des hommages volontaires), oublie en fait l'essentiel : son spectateur, qui se retrouve donc bringuebalé dans cette suite de scènes toutes aussi gratuites qu'inutiles, et de rencontres hasardeuses et absurdes. Si le film a le charme de son couple de comédiens, leur spontanéité, leur énergie, il n'a bien que ça, éparpillé, distrait, pas vraiment drôle (parfois même gênant), pas vraiment intéressant, pas vraiment distrayant, et en fait tristement lassant par son incapacité à dire ce qu'il veut dire et son décalage trop calculé pour être réellement délicieux, loin de la fraîcheur vantée çà et là.
Reste un talent indéniable d'image et de montage et, donc, une bande originale géniale, au service d'un film qui ne mène nulle part.