Etonnant film de Spielberg, qui nous raconte la tambouille du vote du XIIIème amendement de la Constitution des Etats-Unis qui abolit l'esclavage. Etonnant car pour une fois, Steven a dû faire confiance à son scénariste Tony Kushner (qui a travaillé aussi sur Munich) et nous livre une écriture complexe, technicienne.
Lincoln s'est réincarné dans le corps de Daniel Day-Lewis, c’était le plus simple. Le reste du casting vient pointer, sans plus. Au niveau formel, Spielberg mise sur la sobriété, s'arrête sur quelques tableaux vivants, et zoome sur les détails d'une reconstitution maniaque. Ce n'est pas sa plus grande prouesse visuelle, le rendu final s'avère mollasson et un brin académique.
Ce film s'apparente à un documentaire richement illustré concernant une période spécifique de l'histoire américaine, qui plaira aux amateurs. En ces temps d'Obama, il y a évidemment un ironie mordante lorsque l'on voit les démocrates de l'époque s'escrimer contre l'abolition de l'esclavage. Et les anecdotes concernant la personnalité de Lincoln sont plutôt rafraîchissantes (Abraham était pas mal de la déconne, le saviez-vous ?)
Je me demande comment le grand public, notamment non américain, peut y trouver son compte. Car de l'implicite, le film en comporte une bonne cargaison. Point de pédagogie ni de petites fiches de résumé, il vous faudra réviser au préalable l'histoire de la guerre de Sécession et le système politique des Etats-Unis pour suivre les nombreuses escarmouches verbales. Le film a néanmoins un grand mérite : celui de montrer la multiplicité des points de vue sur un idéal telle que l'abolition et la façon dont fonctionne la politique, qui doit composer avec les personnalités et les mentalités de l’époque, et qui doit prendre les chemins de traverse, parfois bien boueux, pour parvenir à concrétiser cet idéal.