On avait laissé Julien Maury et Alexandre Bustillo en tête de file d'un cinéma fantastique décomplexé avec le glaçant A l'intérieur. En attendant leur court métrage dans le prometteur Paris I'll kill you, les deux compères sortent leur deuxième film, variante sur le thème de la maison hantée.
Le duo s'affirme vite comme des réalisateurs extrêmement talentueux. Dotés d'un sens du cadrage millimétré, ils n'ont aucune peine à nous faire rentrer dans leur univers si spécial, à grand renfort de lents panoramiques. Leur mise en scène, sans révolutionner le genre, est d'une grande efficacité, tombant rarement dans la facilité de l'effet de surprise gratuit, et le malaise ambiant est renforcé par une direction artistique stupéfiante.
C'est là la grande force de Livide. L'esthétique du film fait beaucoup pour renforcer l'ambiance sombre du récit. Aux images splendides de la Bretagne succèdent des intérieurs lugubres à souhait, aux qualités anxiogènes indéniables. Chaque scène ayant lieu dans la chambre de la vieille femme, par exemple, est littéralement à couper le souffle, tant les jeux de lumière et le décor en lui même font ressentir la plus exquise des terreurs.
En revanche, côté scénario, ça pêche. L'histoire en elle même est plutôt bien narrée, sans se révéler follement originale, elle n'a rien non plus de déplaisant, même si elle s'essouffle un peu aux deux tiers du film, une fois l'effet de surprise levé. Le problème se pose aux niveaux des situations proposées, qui sont franchement inégales. On passera sur les motivations de l'héroïne, sur son changement d'avis radical ou sur sa relation avec Will, son compagnon, mais certaines des réactions des deux frères sont tout simplement navrantes, et on en vient à questionner la véracité des personnages. Quant aux dialogues, l'accent réaliste qui leur est donné énerve vite tant on a l'impression de se retrouver face à deux jeunes de banlieues un peu stupides.
Un bon film, donc, qui lorgne souvent du côté de l'excellent Argento (auquel le duo rend hommage lors d'un clin d'œil appuyé), mais qui sonne parfois un peu trop creux pour être vraiment incontournable. Dommage, il y avait là le matériau pour un vrai grand film d'horreur. Mention spéciale, tout de même, à Chloé Coulloud, qui se révèle comme l'un des futurs grand talent du cinéma français. A suivre...