Loin des hommes par cloneweb
Après avoir enchainé les seconds rôles et quelques remakes d’Alfred Hitchcock (Psycho et Meurtre Parfait), Viggo Mortensen a été révélé par le Seigneur des Anneaux. L’acteur ayant incarné Aragorn a ensuite enchainé différents très grands rôles, mais a toujours évité la grosse machine hollywoodienne pour tourner avec des réalisateurs plutôt indépendants ou dans des films qui lui plaisaient particulièrement à lui sans chercher un réel succès. En 2015, il revient sans doute avec le rôle le plus inattendu puisqu’il a tourné en français et en arabe dans la libre adaptation d’une histoire d’Albert Camus.
Loin des Hommes, inspiré par L’Hôte de Camus, une nouvelle parue pour la première fois en 1957 dans le recueil L’Exil et le Royaume, raconte l’histoire d’un instituteur francophone vivant isolé dans les montagnes d’Algérie en pleine guerre. Ancien militaire, il doit escorter un prisonnier jusqu’à un village pour le livrer aux autorités.
Si on n’a aucun doute sur le fait que Viggo Mortensen livre un personnage particulièrement fort par son interprétation et sa maitrise des langues, il faut noter que Reda Kateb est loin d’être en reste. Le comédien y explose de talent. De fait, le duo permet un film fort magnifié par l’Algérie elle-même, véritable troisième personnage de l’histoire à travers ses paysages montagneux et arides (et bien que le film ait été tourné au Maroc) et les éléments qui s’y déchainent. David Oelhoffen voit d’ailleurs son travail facilité par l’ampleur des décors et la lumière naturelle qui les illumine. Le réalisateur fait un travail à la fois sobre et remarquable, positionnant sa caméra proche des gens quand on est dans l’intime mais aussi, naturellement, loin des hommes grâce à des plans très larges rappelant rien de moins que David Lean.
Le film produit par Marc du Pontavice porte d’ailleurs parfaitement son titre puisque l’histoire montre bien le décalage qu’il peut y avoir entre les évènements se déroulant à Alger (qu’on ne voit jamais) et la réalité telle qu’elle est dans l’Atlas algérien, où un instituteur continue à faire son travail le plus normalement possible jusqu’à ce qu’il soit dérangé. Le personnage de Mortensen, surtout, permet de montrer le fossé qui sépare les dirigeants de la réalité du terrain, lui cherchant à apporter bien d’autres choses à la population locale que les colons français, à commencer par leur liberté.
A travers leur voyage et ses péripéties, le duo va naturellement se découvrir. Ensemble, ils vont devoir faire face à des choix complexes, que ça soit dans leurs traditions respectives, leurs envies et la réalité géo-politique. Et le spectateur va découvrir que malgré leurs différences, ils sont bien plus semblables qu’il n’y parait surtout, une nouvelle fois, face à des évènements qui les dépasse. Voir deux hommes si différents mais si unis évoquer ensemble leurs libertés n’a jamais autant résonné qu’en ce mois de janvier 2015, quand bien même leur histoire aurait soixante ans.
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