Longlegs
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Longlegs

Film de Oz Perkins (2024)

Depuis bien longtemps, Nicolas Cage multiplie les rôles dans des projets plus ou moins intéressants. Peu importe la qualité du scénario ou de son personnage, l'acteur s’investit complètement. Jamais le spectateur ne ressent l'ennui de l'acteur connu qui vient gentiment cachetonner, comme c'est le cas de beaucoup d'autres. Il faut le voir dans Willy's Wonderland, dont le scénario est quasiment celui du nullissime Five Night's At Freddy's, mais qui est magnifié par la prestation mutique de Nicolas Cage. Il est possible aussi de citer Pig, qui aurait pu être ridicule avec son histoire de chef cuisinier reclus en compagnie de son cochon truffier et qui voit l'animal se faire enlever. Là encore, c'était sans compter sur Cage, qui livre une prestation superbe et presque métaphysique. Même le très mauvais Reinfield devient génial le temps des trop rares apparitions de Nicolas Cage.

Il s'associe ici à Oz Perkins pour les besoins de Longlegs, dans lequel il incarne le personnage du titre. Oz Perkins avait déjà écrit et scénarisé un I Am The Pretty Thing That Lives In The House de sinistre mémoire pour Netflix, et revient cette fois avec une histoire de tueur en série qui déviera vers le fantastique. Le spectateur y suit l'agent Lee Harker, incarné par Maika Monroe, vue entre-autre dans Sons Of Philadelphia. Fraîchement enrôlée dans le FBI, elle révèle à son chef, lors d'une scène traumatique voyant la mort de son partenaire, avoir quelques talents de médium. Son supérieur (incarné par Blair Underwood) la met sur une affaire étrange dans laquelle plusieurs familles sont massacrées. Tout y laisse à penser que le père de famille est systématiquement responsable, mais des lettres codées signées Longlegs démontrent qu'un serial killer est à l'oeuvre. L'affaire va mener l'agent Harker à se poser des questions sur son passé, et à se demander si elle n'a pas rencontré Longlegs quand elle était enfant.

Le film possède de vrais problèmes d'écriture, et il est dommage qu'Oz Perkins n'ait pas confié son écriture a un scénariste plutôt que de vouloir l'écrire lui-même. Les capacités médiumnique de l'héroïne sont sous-exploitées, certains faits de l'enquête sont finalement bancals, comme le fait que le tueur n'est jamais entré dans les demeures où se sont déroulés les meurtres. Mais le pire, c'est la révélation des enjeux en voix-off à la fin du film, comme si le scénariste-réalisateur ne savait pas comment amener son twist et ses révélations (un comble pour un film suivant une enquêtrice).

Mais là où l'écriture n'est pas le point fort d'Oz Perkins, il se rattrape sur la réalisation et l'ambiance distillée tout au long du film. Les décors de demeures isolées sont magnifiées par la caméra. Ainsi, la maison de l'héroïne, tout en bois, perdue dans les bois, semble tout droit sortie d'un conte de fée horrifique. Le réalisateur utilise de longs plans fixes pour créer une ambiance malaisante qui colle à la peau. Il fait confiance à l'attention de son spectateur, et distille parfois des indices en arrière plan sans insister dessus, ce qui motive le spectateur à rester attentif en se laissant porter par cette histoire dérangeante.

Longslegs dispose de peu de moments de répits (l'un d'entre-eux étant le dialogue quelque peu surréaliste avec le directeur de l'hôpital psychiatrique) et ils sont de courte durée. Les personnages sont étranges, l'ambiance est poisseuse, les révélations font froid dans le dos, et le film va jusqu'au bout de son propos. L'exploration de la ferme, les étranges poupées, Oz Perkins sait utiliser les ficelles du genre, exploiter les décors pour mettre le spectateur mal à l'aise et continuer à suivre cette histoire horrible.

Et bien entendu, il y a la présence de Nicolas Cage. Presque méconnaissable, malsain, dérangeant et investi, il n'a pas un temps de présence conséquent durant le film. Mais c'est une excellente chose, car chacune de ses apparitions est marquante, inoubliable. Nicolas Cage fait vraiment peur, et Oz Perkins met en valeur les prestations de l'acteur, n'hésitant pas à ne filmer que le bas de son visage, par exemple, pour accentuer l'étrangeté du personnage.

Au final, Longlegs aurait pu être un chef d’œuvre s'il avait été mieux écrit. Il n'en est pas moins un très bon film, à l'esthétique travaillée, à l'ambiance poisseuse. Longlegs est un film qui fait peur, et c'est déjà beaucoup.

ninik
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le 8 août 2024

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ninik

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