Il était prévisible qu'après un premier long-métrage aussi brillant que Saint Maud, la réalisatrice britannique Rose Glass allait pouvoir traverser l'Atlantique et se voir confier des moyens plus importants. Non que Love lies bleeding soit un blockbuster, ce n'est sans doute pas vers quoi tend la cinéaste trentenaire, mais un récit très noir, série B riche en testostérone, situé dans un territoire de sordides Rednecks, à la fin des années 80, c'est un sacré changement d'ambiance auquel nous sommes conviés. Romance gay, violences conjugales, rapports filiaux sulfureux, le film dégaine toute sa hargne progressivement, comme une revanche féminine sur des décennies de constantes viriles jamais questionnées. Love lies bleeding ne fait pas dans les nuances, les personnages masculins sont immondes, et maintient son cap, avec une jubilation dévastatrice, usant même d'onirisme ou de surréalisme, dans quelques scènes. Seul l'humour fait défaut, excepté à la fin, ce qui empêche le film d'être comparé aux œuvres des frères Coen mais on trouvera bien d'autres références assumées à énumérer. L'abus de stéroïdes et la passion des armes à feu peuvent en tout cas conduire à des situations extrêmes et sans retour, serait-ce aussi l'une des leçons d'un film très saignant auquel on peut sans doute reprocher de ne pas réussir à totalement maîtriser son passage du réalisme du début à l'outrance opératique qui prédomine par la suite ? Tant pis, le terrible trio composé de Kristen Stewart (étonnante), Kate O'Brian (monstrueuse) et Ed Harris (hallucinant) vaut sans conteste le déplacement.