C'est un film court et plein de longueurs, horizontales et verticales, une lente traversée comme dans une grille de mots croisées. Lucky avance parfois un peu lourdement, avec ses grosses bottes de cowboy sur le déclin, un peu maladroitement, avec ses définitions lourdement expliquées, mais c'est magnifique de retrouver Harry Dean Stanton arpentant la vallée de la mort dans un dernier western. Juan Wayne, c'est un peu trop, le STAGECOACH défraichi aurait sans doute suffi, mais qu'importe puisque c'est une raison de plus de nous offrir des scènes magnifiques ou juste touchantes.
Que ça soit avec le médecin, cette femme qui passe le voir, on préférera, comme lui, un "awkward silence" au trop facile "small talk". En suivant la routine de Lucky, on retrouve de vieux amis, un David Lynch (merveilleux) fatigué et à bout de nerfs, et on fait de nouvelles rencontres, les dialogues sont vifs, parfois tranchants, mais le plus souvent d'une tendresse inattendue. Et la ville fantomatique nous ouvre son âme légère. Une heure et demi à peine, d'un réalisme naïf et cru, et un dernier regard (caméra), amusant et amusé pour les adieux d'un impressionnant cowboy.