Danse avec les shtars

A un moment donné, quand on navigue en permanence dans l'univers du rap français, on est un peu obligé de se jeter à l'eau et de regarder Ma 6-T va Crack-er. Avec les nombreux clins d’œil au film de Jean-François Richet encore offerts par les rappeurs, le film dispose d'un aura tout aussi grande, si ce n'est plus, que celle de La Haine.

Avec son aspect presque documentaire, la caméra du réalisateur est en perpétuel mouvement et filme une société statique, des banlieusards peu appréciables, qui pensent qu'à se farcir des meufs ou saigner des keufs, quand ce n'est pas pour engrainer les enfants à devenir des caïds. Tout n'est que engrenage, et on suit principalement un lycéen qui part en couilles, ainsi qu'un négro irascible ayant carotter son chrome de shit, dont les destins ne peuvent que s’entremêler pour un final tragique.

Influencé par le marxisme, le cinéaste nous livre un témoignage d'une cité stagnante, où le chômage domine presque autant que la mauvaise foi des habitants, qui passent leur temps à rien branler dans des arrêts de bus ou des escaliers. Véritable appel à la révolution, ces fouteurs de merde imposent tout de même réflexions sur la condition sociale, comme sur cette belle scène de l'arrêt de bus.

Les personnages, interprétés par de vrais cassos', sont incroyables par leur naturel. Ils sont désespérants, énervants, et tout comme le flic, on a envie de leur en faire baver à ces connards. Et c'est sans doute pour ça que la moyenne est si affreuse. On ne peut qu'être exaspéré par cette misère, l'ayant partagée ou pas, et c'est bien là le point fort du film. C'est un excellent témoignage, poignant et sincère, bercé par une B.O culte.

Il n'y a qu'à voir la fabuleuse scène où ils fauchent le whisky à la supérette, où s'en suite une course sur la magnifique instru' de Retour aux Pyramides des X-Men. Ou ce final de la boîte de la nuit, où on assiste à un parallèle entre une fusillade, et le concert des 2 Bal 2 Neg' qui donne des frissons, mais qui dispose du seul problème du film, avec ce cafouillage légèrement incohérent sur le guet-appens. Impossible de rester de marbre, mais perso, ce film m'a fait crack-er.

Ce film est vraiment ouf, une véritable sédition.