Je ne vais pas faire ici l'explication de la longue passion qui me lit à Max. Mad pour les intimes. "Ce type-là, un peu trop téméraire" pour le commun des mortels. Enfin, bref, non, on ne va pas parler de ça, surtout que j'en ai déjà étalé énormément à ce sujet sur les deux premiers opus, chef-d'oeuvres chacun à sa manière bien personnelle. Non, je pense que l'important, cela va être de faire comprendre pourquoi Mad Max 3 a réussi à passer la moyenne alors qu'il partait avec un sacré handicap. L'opus mal-aimé, abandonné même de son réalisateur qui s'en est désintéressé durant le tournage, pour cause de mort d'un proche lors de la pré-production. Pas facile, quand même le garant de la personnalité de l'oeuvre se fait la malle. Mais...
Du désert, de la poussière, Max nous a habitué à tout ça. Il m'a habitué à tout ça. Et puis, tiens, d'un coup, il y a des enfants. Ola, lecteur avisé, ne quitte pas si vite la critique, rien de sale... et c'est bien là le problème. Max s'assagit, il vieillit, le pauvre, on ne peut pas être en colère tout le temps. Parfois, il faut aussi savoir pensé à l'avenir. Merde, peut-être même penser à ce qu'on va laisser derrière soi. Peut-être que Max y pense aussi, et d'ailleurs, il sauve des enfants, maintenant, c'est qu'il a peut-être finalement foi en ce désert brûlant qu'il a haï pendant si longtemps.
Enfin, au cœur de cette critique, la véritable interrogation, ça va être : mais si ça n'avait pas été Max, aurais-je aimé autant ? Oui. Et non. Pas une question facile, faut dire. Déjà, si c'est Max, j'attends. Forcément, du sang, des larmes, des courses-poursuite et, tiens, peut-être un peu d'essence, aussi. J'attends surtout le regard électrique de Mel, qui parle bien plus que Max lui-même. Et j'attends son fusil à canon scié, aussi. Il fait un petit cameo, donc tout va bien. Mais c'est Max, quoi, merde ! Et ce récit, là, il est vachement sédentaire, quand même. Ho, m'faites pas dire ce que j'ai pas dit : le deux aussi, il avait posé ses guêtres, mais il parlait d'un départ en préparation, tout tournait autour d'une mécanique rutilante, qui n'attendait qu'un peu de gazole pour hurler. Là, on parle d'une cité, celle de la copine Tina, qui n'a pas l'air de vouloir bouger des masses et d'un Max piéton, qui perd sa voiture dès l'introduction. Une voiture tirée par des dromadaires. Ou des chameaux, enfin, le principe est là : Max ne roule plus. Allez, il y a bien une course-poursuite, mais pour achever le fan de Mad Max, elle sera sur des rails - et de courte durée. Un peu comme le film, qui se laisse gentiment promener, la course-poursuite fait un peu pale figure à côté de ses deux grands frères. Pas facile de vivre dans l'ombre des aines.
Et pourtant, c'est toujours Mad Max. Un univers brûlé par le soleil, moins de gueulards à la sexualité étrange, mais davantage d'un mythologie qui achève de se mettre en place. Il y a donc bien eu une guerre nucléaire, derrière tout ça et maintenant, on a les moyens de montrer davantage de survivants pour en faire la causette, alors on les montre et du coup, même que Max a l'air de n'être qu'un pèlerin dans un Conan de Milius et c'est plutôt cool. D'autant que c'est plutôt joli : de beaux plans désertiques, apocalyptiques, d'un Mel Gibson toujours aussi rayonnant, au milieu de ces horizons de sable. Classe. Et puis, cette intrigue sur les enfants, si c'était aussi une façon d'achever le personnage ? De le voir faire la paix, une bonne fois pour toute, avec un monde contre lequel il s'est battu sans relâche ? Après cet opus, il n'y aura plus rien, et même le nouveau Road Warrior semble être un simili-reboot qui ne s'assume pas. Comme pour James Bond, on garde l'aura du personnage, mais Mad Mel a bel et bien fini sa carrière, là, au bout d'une piste, regardant l'horizon aride. Sacrifié une nouvelle fois, et encore pour la bonne cause.
Même si cela reste un film moyen, peut-être même davantage que moyen, je ne parviens pas à le haïr, bien au contraire. Déjà, il y a Mel Gibson dans un de mes rôles préférés, qui traîne ce regard acéré et cette présence et ça, ça vaut tous les films post-apo qui sortiront après (me parlez pas du Livre d'Eli, sérieux !). Il y a la course-poursuite qui, si elle n'égale pas ses aïeux, vaut quand même le détour et une apparition de Bruce Spencer qui semble lui-même jouer un remake de son propre rôle enfin, bizarre. C'est juste dommage que le film soit découpé en deux parties distinctes, d'égal intérêt mais tellement antagoniste l'une de l'autre que les faire concilier rend le bousin un peu bancal. Dommage, parce que Mad Max, putain, ça envoie quand même drôlement fort.