« Adam’s Rib » est un film de George Cukor, qui met en scène Katharine Hepburn et son partenaire de prédilection, Spencer Tracy. Il s’agit d’un film de procès, inspiré de l’affaire du divorce des Massey, défendus par les époux Dwight et Dorothy Whitney.
À New York, le procureur Adam Bonner voit débarquer sur son bureau le seul procès dont il ne voulait pas écoper : le cas Warren et Dorris Attinger. Mrs Attinger, lassée des absences répétées de son mari, l’a suivi lors d’une de ses escapades, et, lui tirant – plus ou moins – dessus à cinq reprises, l’a blessé. Les collègues d’Adam l’assurent que le procès ne sera qu’une formalité, tant les preuves sont accablantes.
Mais, ce que ces braves messieurs ignorent, c’est l’intérêt que porte Amanda Bonner – avocate de son état – au cas Attinger, à tel point qu’elle décide de défendre la bonne dame. Ses raisons ? Donner les mêmes chances à cette femme qui a surpris son mari avec sa maîtresse que celles qui auraient été données à un homme dans la même situation. Evidemment, lorsqu’il apprend la nouvelle, son mari Adam n’est pas le plus heureux des hommes…
« Adam’s Rib » – un titre original ô combien plus intéressant que sa traduction française – est une comédie mêlant, sur plusieurs jours, plaidoyers au tribunal dans la journée et scènes conjugales au domicile des Bonner dans la soirée. Comme de juste, la lutte de plus en plus acharnée que se livrent les époux Bonner à la barre ne va pas tarder à avoir des répercussions sur leur propre mariage.
En maître de la comédie, genre auquel il a offert des contributions majeures, George Cukor sait savamment installer son décor et écrire des scènes et des dialogues qui font mouche. Le succès de ceux-ci doit beaucoup à l’alchimie évidente entre Katharine Hepburn et Spencer Tracy, ainsi qu’à leur génie comique certain (ce sont deux très grands acteurs). Les deux personnages qu’ils incarnent partagent une grande complicité ; l’on devine un couple marié qui possède déjà une longue histoire. Ils se chamaillent, mais c’est toujours avec tendresse : des disputes qui tiennent davantage du jeu d’esprit que du véritable conflit. Leur relation sera exploitée avec brio pour donner lieu à des dialogues savoureux et à des scènes particulièrement bien vues.
Cukor complète son tableau avec l’apport judicieux de quelques seconds rôles comiques assez bons ; Tom Ewell, par exemple, qui joue le mari Attinger, avec sa drôle de physionomie, ou encore David Wayne, impayable, insupportable, souvent très drôle, mais qui met la patience de Spencer Tracy et du spectateur à rude épreuve.
Le second grand thème du film est un peu plus sérieux : il s’agit du traitement de l’égalité homme-femme, dans le cas particulier de la justice. Si le film est avant tout une comédie, l’aspect procès est bien traité, et l’amateur retrouve avec plaisir les codes et habitudes des grands représentants du genre. Dans ce procès, donc, l’avocate Amanda Bonner cherche à démontrer que sa cliente, Doris Attinger, n’a agi que pour sauvegarder son ménage ; elle souhaite que les jurés la considèrent avec la même sévérité – ou la même indulgence – qu’un homme qui aurait commis les mêmes actes si les rôles avaient été échangés. Toujours avec beaucoup d’humour, et un certain sens de la moquerie, Cukor et Hepburn s’attachent à démontrer l’égalité des femmes et des hommes sur les plans intellectuel et physique, exigeant de fait un traitement identique devant la loi.
« Adam’s Rib » est l’une des grandes comédies de George Cukor. Superbement écrite, magnifiquement interprétée par ces deux immenses acteurs que sont Spencer Tracy et Katharine Hepburn, c’est un délice de tous les instants. Il convient de laisser un mot pour son final absolument grandiose – l’un des meilleurs qu'il m’ait été donné de voir – et de dire, que, pour une fois, la réalité a dépassé la fiction. En effet, après avoir représenté les Massey dans leur divorce, les Whitney se séparèrent à leur tour et épousèrent les premiers.