Juin 1940.C'est la débâcle et l'armée française bat en retraite devant l'avancée allemande.La 7e compagnie de transmissions fait partie des unités en pleine reculade et trois de ses membres,le chef Chaudard et les soldats Pithivier et Tassin,se retrouvent isolés du groupe et se planquent dans les bois en attendant des jours meilleurs.Hélas pour eux ils sont rejoints par un jeune lieutenant belliqueux dont l'avion vient d'être abattu.L'officier les oblige à attaquer l'ennemi,ce qui va les pousser malgré eux à accomplir divers actes d'héroïsme.Robert Lamoureux est plutôt oublié aujourd'hui,et pourtant ce fut à partir des années 50 une star notoire du comique français.Artiste polyvalent il a été comédien,humoriste,chansonnier,auteur de théâtre,scénariste et réalisateur.C'est lui qui chantait "Papa,maman,la bonne et moi" ou qui interprétait le sketch "Le canard était toujours vivant".Au cinéma il était un acteur vedette mais sa carrière de réalisateur fut moins fournie et quelque peu étrange.Il fit en 1960 deux films,"Ravissante" et "La brune que voilà",avant de lâcher l'affaire pendant 13 ans pour revenir avec ce "7ème compagnie" qui fut un triomphe public l'incitant à poursuivre dans cette voie en shootant quatre autres films entre 75 et 77,dont les deux suites à ce succès.C'est produit par Alain Poiré pour la Gaumont et Lamoureux ,également auteur du scénario,s'est entouré de bons professionnels comme l'opérateur Marcel Grignon ou le musicien Henri Bourtayre.Il est en outre assisté de Bernard Toublanc-Michel,réalisateur de métier qui réutilisera Erik Colin,l'interprète du lieutenant Duvauchel,dans un téléfilm qu'il tournera en 90,"Plus folle que reine".On peut estimer que le carton qu'a fait le film est mérité,c'est du bon cinéma populaire et Lamoureux,dont l'écriture est pleine de finesse,sait manier l'humour avec talent.Il parait qu'il s'est inspiré,pour l'avoir vécue,de cette période trouble de l'Histoire,et il a réussi à tenir le difficile équilibre entre farce militaire et évocation d'évènements tragiques.La drôlerie l'emporte,c'est la nature de l'entreprise,mais de nombreuses notations interviennent pour opportunément souligner l'aspect dramatique servant de toile de fond au récit.Le danger est bien là,même s'il est le plus souvent en arrière-plan,et les morts violentes propres à la guerre surgissent à l'occasion.La causticité de l'auteur transparait à travers sa description ironique de ce conflit qui voit une armée française qui ne parvient même pas à reculer aussi vite que les allemands avancent et qui se barre dans une désorganisation totale.On est loin des sagas héroïques trop vues à l'écran en ce contexte,mais il n'y a pas ici de jugement.Ces soldats français sont froussards et tire-au-flanc,et alors?Il ne s'agit que de braves types qu'on a plongés sans leur demander leur avis au milieu d'un combat auquel ils n'étaient nullement préparés.L'un est un paisible quincailler,l'autre travaille aux abattoirs,rien à voir avec des bêtes de guerre,les mecs veulent juste se tirer indemnes de ce bourbier.Une dimension sociale s'invite inopinément dans l'histoire avec l'arrivée de Duvauchel,fils de bonne famille,une famille qui précisément fournit le commerce de Chaudard.Supériorité complète donc de l'aviateur qui guerroie dans les airs pendant que le sous-off rampe au sol,qui le commande de par son statut d'officier et qui dans le civil contrôle son gagne-pain,ce qui permet d'apprendre que le pauvre Chaudard est non seulement un militaire nul,mais qu'il est en outre un quincailler peu performant.Autre bon point,la vision des Allemands,qui ne sont pas du tout un ramassis de crétins qu'on roule aisément dans la farine comme il est d'usage dans le genre,mais sont au contraire organisés et extrêmement dangereux,même si nos héros d'occase finiront par les avoir,du moins à leur niveau.Et puis Lamoureux le dialoguiste nous régale de formules qui sont restées et infusent jusque dans notre langage courant,à l'instar du "mais pas si vite!" lâché par le colonel excédé de voir ses subordonnés détaler à toute allure dès qu'on leur ordonne de décrocher,le "j'ai glissé,chef!" du calamiteux Pithivier,jamais en retard d'une connerie,ou le tonitruant "et du à l'ail,vous avez du à l'ail?" proféré par Tassin extorquant du saucisson à un épicier peu coopératif.Les acteurs sont parfaits et judicieusement castés,à l'image du trio de nullards incarnés par un Pierre Mondy extra en sergent-chef constamment dépassé par les évènements,un Jean Lefebvre désopilant en bidasse aussi morfale qu'idiot et un Aldo Maccione formidable en brute pragmatique.Lamoureux joue en personne le colonel passant son temps au téléphone pour tenter de gérer un repli peu stratégique,Erik Colin a du charme et de l'allant en pilote tête brûlée,Pierre Tornade excelle en capitaine dirigeant sans grande efficacité la 7ème compagnie,un tout jeune Alain Doutey se démène en soldat évadé,Corinne Lahaye,épouse de Jean-Pierre Darras à la ville,est comme d'hab très sexy dans son emploi favori de chaudasse,Jacques Marin crève l'écran en épicier faux-jeton et Paul Mercey est fameux en boulanger dont la femme accouche.A noter la participation de la femme et de la fille du réalisateur,Magali de Vendeuil et France Lamoureux.Note et critique de film de Robert Lamoureux publiées précédemment:"On a retrouvé la 7ème compagnie"-5.Moyenne:6.