Maître du fantastique européen depuis près de dix ans, l'Espagnol Jaume Balaguero est pourtant peu connu du grand public alors qu'il s'agit de l'homme derrière le paraît-il ubër terrifiant Darkness et le génial Rec réalisé pour 800000 malheureux euros avec son compère Paco Plaza.
Avec Malveillance, (Mientras Duermes en VO), Balaguero délaisse son genre de prédilection pour s'attaquer au Thriller Pur tendance Hitchcock.
En effet, la construction du métrage rappelle celle des films du maître du suspense : un pitch simple mais d'une efficacité redoutable, une action qui se déroule essentiellement à huit-clos et une narration qui joue sans cesse avec les nerfs du spectateur.
Malveillance fait partie de ces œuvres dérangeantes qui reposent en partie sur le rapport fascination / répulsion entretenu avec le personnage principal.
Campé par l'immense Luis Tosar (déjà impressionnant de charisme dans l'excellent Cellule 211 et dans Miami Vice, il confirme tout le bien qu'on pensait de lui), le dérangé au cœur de l'intrigue n'est pas sans rappeler un certain Dexter Morgan dans la mesure où il dissimule lui aussi sa folie sous une apparence normale et où le spectateur s'attache à lui.
Dés lors impossible de ne pas jubiler devant les exactions et les manipulations de ce monstre à visage humain qui s'emploie consciencieusement à pourrir la vie des habitants de l'immeuble où il travaille en tant que concierge.
Ainsi, malgré quelques passages malsains et le caractère éminemment pervers de l'intrigue, on prend un malin plaisir à suivre un récit qui à l'intelligence de laisser tomber l'horreur pure (une unique scène gore en 1h40 c'est devenu rare dans ce genre de film...) au profit d'un suspense implacable et qui étonnamment, ne se prends pas trop au sérieux. Une démarche salvatrice à l'heure où le cinéma de genre accouche d'œuvres qui ne cherchent qu'à choquer le spectateur...
Le film distille donc quelques grands moments d'humour noir qui viennent contrebalancer la cruauté et la noirceur d'une histoire guère avare en rebondissements dont un twist final diabolique.
Le portrait sociologique dressé par le réalisateur n'est également pas étranger à la dédramatisation du récit dans la mesure où les « victimes » du film sont pour la plupart des archétypes de bobos ou de bourgeois passablement énervant et peu attachants ce qui annule toute empathie. C'est d'ailleurs là, un des seuls défauts du film qui est de proposer des personnages secondaires peu intéressants à l'exception d'une gamine parfaitement odieuse.
Vous l'aurez compris, Malveillance est donc un film très plaisant à suivre et une franche réussite de la part d'un réalisateur qui a su se réinventer. Souvent flippant, parfois drôle et magistralement interprété par un acteur qui montre qu'il n'y a pas qu'Antonio Banderas et Javier Bardem dans la vie, le métrage peut-être résumé à la tagline de son affiche signée Mad Movies : « Vos nerfs vont souffrir et vous allez aimer ça ! »
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