Cher journal,
Je me souviens de ce jour. Un beau jour sur la mer, les yeux dans les vagues et les requins dans les écoles, c’te blague. Le bonheur dans ses petits yeux, pur. Tout était parfait. Je retrouvais les miens, comblé.
Je me souviens de cette nuit, glaciale et flamboyante. L’Adagio résonne encore dans mon cœur, les larmes ont séché sur mes joues. Le crime est resté impuni, ou peut-être pas. Je n’ai pas le droit de me plaindre. Je veux juste serrer les poings et cogner la rage. Brisé.
J’ai pensé à lui, petit, adulant son père. Père qui aujourd’hui est parti. Il ne sera plus, je le savais et pourtant mon cœur se serre. Père, mon frère, qui ouvrait tellement son cœur qu’il en a chopé la crève. Je reviens alors vers ces souvenirs, mort au fond, mais toujours debout. Il ne me reste plus que ça, et quelques portraits, autel de mon passé. Il ne me reste plus que lui, mais je ne me sens pas la force d’être à ses côtés, ici. La douleur est toujours là, brûlante, mordante.
J’ai pensé à elle, aussi. Ses cris me manquent, ses rires encore plus. Sa vie est partie en fumée, un soir d’hiver. La mienne aussi. Moi je ne peux pas renaître de mes cendres, je ne suis pas un fucking phoenix. J’étouffe, j’ai envie de hurler, je veux saigner. Peut-être est-ce seulement pour me sentir en vie ? Je dois encore rester, veiller sur lui. Même dans le silence.
Les mots me manquent…
L’avenir sans lui me parait trouble. Il revenait toujours, avant. Il était là, pour lui, pour moi. Je ferai de mon mieux. Je serai oncle Lee.
Le printemps reviendra…
La balle rebondit, le poisson mord, la neige tombe.