Martyrs fait partie des films d'horreur tellement énormes qu'il est impossible de les ignorer, d'autant plus quand on se prête à l'exercice du remake. C'est pourtant ce qu'il faudra essayer de faire pour le juger à peu près objectivement. Autant dire que la note pencherait alors plutôt vers le 4/10, mais on basculerait plutôt dans la catégorie du petit film bis, thriller horreur violent qui n'a jamais la moindre portée sur le spectateur autre qu'un divertissement. On passe donc d'un chef d'oeuvre à un DTV. Toutefois, ce remake essaye de petites choses, malheureusement pour nous rarement réussies.
Le principal point positif est ici la facture technique, plutôt lisible et bien éclairées. On perd donc beaucoup en sauvagerie (le montage nerveux des confrontations entre lucie et ses démons), mais on voit un peu mieux ce qu'il se passe. On peut aussi trouver intéressant le développement de l'épisode de l'orphelinat où commence à se nouer une amitié avec Anna. Hélas, c'est simplement plus long et un peu moins complexe que chez Laugier. La trame reste la même dans les grandes lignes, et commence à subir quelques variations à partir de l'instant charnière où on découvre la chambre de séquestration. Malheureusement pour nous, on passe d'une violence interdite aux moins de 16 ans à un restriction aux -12. Le gore est régulièrement éludé, et les tortures... On s'y prendrait presque à rire tellement elles sont inefficaces en comparaison de l'original. C'est d'ailleurs là que réside le principal défaut de ce remake. Le Martyrs français se vivait comme un calvaire authentique, il avait toutes les allures d'une initiation dans son dernier tiers et donnait une récompense par une accession à un stade de conscience supérieure (soit énormément de matière pour enrichir le film). Ici, cette initiation n'aura jamais lieu. Jamais la proximité ne se crée avec les protagonistes, et pire, la personne initiée est ici au second plan, ses tortures étant fréquemment entrecoupées par d'autres actions extérieures qui viennent paralyser la moindre forme de calvaire. Et d'ailleurs, le film se raccroche bien vite à la structure classique du "il faut appeler les autorités et se sortir de là", classique du DTV horrifique à l'inspiration modérée. Ca plus l'absence d'impact des tortures (attendez de voir la gueule de la torturée dans la chambre en robe blanche sans un seul bleu pour comprendre combien on se fout de l'impact), on tombe déjà sous la moyenne.
Vers les 2/3, le film prend davantage ses distances avec l'original, toujours hélas dans la direction du divertissement médiocrement exécuté. On a donc droit à la révélation du but des expériences avant l'initiation (bonjour le désamorçage), au cours d'un dialogue ponctué de "mais vous êtes des cinglés !" "C'est pour ça que vous tuez tous ces gens ?" "Quand la police arrivera, elle vous..." Pitié. Le tout débouchant sur un final assez abracadabrantesque pour la prise de conscience, qui dérive vers la symbolique saphique avec bien moins de cohérence que ce que Laugier avait installé. A titre d'anecdote, je ne peux m'empêcher de ressortir un court passage qui m'a fait littéralement exploser de rire. C'est une parodie involontaire de l'original admirable. On se rappelle tous de la fantastique sortie de Mademoiselle, qui s'expédie dans l'autre monde avec des dernières paroles énigmatiques (doutez Etienne !). Ici, alors que la personne martyrisée raconte ce qu'elle a vu, un prêtre situé à côté de la table attrape un flingue, balance cash "j'ai entendu ce qu'elle a dit !" avant de s'exploser direct le caisson sans transition. Ha ha ! Moi j'ai entendu et pas vous ! POOOW ! Sérieusement, c'est si caricatural qu'on en meurt de rire. Mais bon, pour la recherche médicale, hein, on repassera. Tous des fumiers, ces richards de merde qui ont peur de la mort !
Bref, Martyrs ricain, c'est pas jojo, mais c'est pas non plus la mort (même si c'est totalement inutile et bien moins efficace). Si seulement nono Mattéi était encore vivant, suis sûr qu'il nous rendrait ça fantastique !