Souvenons-nous, il y a une dizaine d'années, on spéculait sur ces films que nous verrons jamais : The Irishman de Scorsese, Napoléon de Kubrick, Dune de Jodorowski ou encore Megalopolis de Coppola. Mais finalement, lorsqu'ils sortent, ils ne s'avèrent pas aussi parfaits que dans nos souvenirs. Le message du film est clair : la beauté sauvera le monde, dont les riches capitalistes de droite sont les ennemis. Enrubanné dans un film inutilement complexe. Une vision enfantine et superficielle du monde actuel qui ne sied pas vraiment à un homme d'un si grand âge comme Francis Ford Coppola, dont le génie n'est plus à prouver. C'est assez contradictoire pour un film qui oscille entre The Fountainhead de Ayn Rand (dont King Vidor avait adapté le film en 1949 dans Le Rebelle), où la liberté de l'architecte s'exprime en faveur des idées libérales, et la vie de Coppola qui est celle de l'entrepreneur par excellence. Dans Metropolis de Fritz Lang, on montrait clairement qu'une nation où l'élite et les travailleurs agissaient ensemble, serait toute puissante et marcherait sur le reste du monde, ici on est dans le même cas de figure, où la droite libérale et la gauche utopiste s'allie contre le nazisme.


Megalopolis est sans doute l'un des films les plus politiques de Coppola, mais aussi l'un des plus déroutants. S'il ambitionne de traiter de sujets profonds comme la civilisation et l'utopie, le film finit par ressembler davantage à une dissertation philosophique pour les nuls. Les dialogues, souvent ridicules, touchent parfois au grotesque – notamment lorsqu'il cite sans subtilité Fight Club avec des phrases comme "acheter des choses qu'on ne veut pas pour impressionner des gens qu'on ne connaît pas". Le ton satirique et burlesque ne parvient pas à masquer la superficialité d'une vision du monde peu réaliste, presque naïve. On sent qu'il ne manque que Nietzsche en troisième partie pour compléter cette pseudo-réflexion philosophique digne d'une mauvaise copie de terminale.


Le scénario est malheureusement à la hauteur de ces dialogues : confus, sans direction claire, et terriblement prétentieux. Ce qui pourrait être une grande fresque sur la lutte entre idéalisme et pragmatisme devient un enchaînement d’idées mal ficelées, jamais approfondies. Ce genre de film, boudé à sa sortie, est typiquement celui que les critiques réhabiliteront dans 20 ans, lui trouvant une profondeur qui, aujourd'hui, semble tout simplement absente.


Pourtant, on ne peut nier que Megalopolis est un joyau de réalisation visuelle. Le film est un pur plaisir pour les yeux, mêlant l'esprit baroque italien à une débauche de moyens hollywoodiens. Coppola montre ici tout son savoir-faire de réalisateur, maîtrisant chaque plan avec une virtuosité inégalée. Le contraste entre la profondeur esthétique et la vacuité du propos rend l'expérience presque frustrante. Car, malgré tous ses défauts, c'est un film de Coppola, et pour cela, il mérite une certaine forme de respect.

verbomanie
4
Écrit par

Créée

le 27 sept. 2024

Modifiée

le 27 sept. 2024

Critique lue 60 fois

4 j'aime

verbomanie

Écrit par

Critique lue 60 fois

4

D'autres avis sur Megalopolis

Megalopolis
Ragephaelle
1

Une daube sexiste et bourgeoise qui porte bien son nom

Ce film est tout simplement une catastrophe à tous les niveaux. Il s'agit d'une longue et fastidieuse daube sexiste, moche, sans enjeu et qui se termine sur un message politique au mieux débile, au...

le 26 sept. 2024

81 j'aime

30

Megalopolis
Plume231
3

Jusqu'au bout de ses rêves !

Que ce soit bien clair, je trouve cela magnifique qu'un artiste, connu pour être particulièrement ambitieux, fantasque, mégalomane, opiniâtre, ait pu concrétiser un projet qu'il a porté durant des...

le 26 sept. 2024

63 j'aime

10

Megalopolis
Behind_the_Mask
3

La montagne, la souris, l'ambition et l'inassouvi

A la sortie de la séance, un seul sentiment prédomine derrière le masque.Celui de la perplexité.Perplexité devant ce qui lui a été montré.Perplexité devant ce qui est écrit en guise de retour, quand...

le 26 sept. 2024

39 j'aime

8

Du même critique

Megalopolis
verbomanie
4

Critique de Megalopolis par verbomanie

Souvenons-nous, il y a une dizaine d'années, on spéculait sur ces films que nous verrons jamais : The Irishman de Scorsese, Napoléon de Kubrick, Dune de Jodorowski ou encore Megalopolis de Coppola...

le 27 sept. 2024

4 j'aime

Une vie de cinéma
verbomanie
8

Ni dissident, ni partisan, ni courtisan

J’ai longtemps éprouvé un vif intérêt pour la personne de Michel Ciment, un homme de grande culture, correspondant privilégié de Stanley Kubrick, ayant écrit sur Angelopoulos, Boorman, Campion...Un...

le 4 sept. 2021

3 j'aime

1

Un chemin de musique
verbomanie
7

La musique tient-elle un discours ?

Qu'est-ce qui nous fascine tant dans la musique et quel est son rapport au langage ? La défiance du logos envers la poiesis a-t-elle lieue d'être ? Jusqu’au XXe siècle, le classicisme, le romantisme...

le 17 févr. 2021

3 j'aime

1