Pâté en croupe
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Si le film commence plutôt bien, avec les séquences chez la tante d'Ophélie et la rencontre de Tony et Amin avec Charlotte et Céline, sur une plage de Sète, le cinéaste naturaliste qu'est Abdellatif Kechiche ne parvient ni à maintenir cette intensité, ni à vraiment développer davantage ses personnages ou à les faire évoluer.
Ainsi a-t-on l'impression, pendant les trois heures que durent ce film, d'assister de nombreuses fois à des redites ou des conversations qui ont déjà eu lieu une heure ou une heure et demie avant. Un autre problème de taille étant que le rôle des femmes semble essentiellement être de séduire les hommes, à grand renfort de shorts moulants laissant parfois apercevoir le bas des fesses. C'est un reproche attendu et déjà entendu, mais ce n'est pas pour autant qu'il faut se passer de l'écrire: mon sentiment est qu'il s'agit d'un film sexiste.
La qualité de la photographie et le talent du chef-opérateur de Kechiche ne suffisent malheureusement pas à combler le rien, le vide de cette quinzaine héraultaise. Été 1994 qui n'est d'ailleurs même pas mis en valeur (très peu de références à l'époque, si ce n'est le tattoo et le fait que cet outil soit alimenté par des piles), et fait même l'objet d'erreurs historiques (on pense à l'évocation du Kosovo, que personne ou presque ne connaissait en 1994, puisque l'intervention de l'OTAN y a eu lieu en 1999; ou encore à celle du Charles de Gaulle sur lequel le petit ami d'Ophélie serait en mission, alors que la première mission de ce porte-avions ne remonte qu'au début des années 2000...).
Enfin, le rôle de la musique est bien trop prépondérant, et laisse penser qu'elle vient au secours d'un scénario qui n'a, en fait, pas grand-chose à raconter sinon les soirées de biture et de danse d'une jeunesse qui découvre sa sexualité (séquences parfois interminables, comme celle de la boîte de nuit, dans laquelle le fait que deux femmes s'embrassent en public en 1994 paraît d'ailleurs vraiment très peu vraisemblable).
Si l'ambition d'Abdellatif Kechiche était de raconter les "petites gens", leur quotidien et la douceur de vivre du sud de la France, je connais beaucoup de films et de réalisateurs qui y parviennent bien mieux, et dans lesquels les dialogues (par ailleurs probablement improvisés, parfois, dans ce film) ne sonnent pas creux.
En résumé, si "Mektoub my love" demeure un "canto singolo", personnellement cela me conviendra très bien.
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le 11 avr. 2018
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