On est ici face à un film d’animation pas comme les autres à tous points de vue. Et c’est déjà en soi une excellente nouvelle. Si l’utilisation de la technique du stop motion est devenue plus courante depuis des films à succès comme « Chicken Run », ce n’est cependant pas la plus usitée. Sa rareté en fait un petit bonheur pour les yeux dès qu’une œuvre l’emploie. Mais c’est surtout sur le fond que « Mémoires d’un escargot » se différencie du tout-venant de l’animation contemporaine. Ici, c’est sombre, dépressif et clairement pas destiné au jeune public. Même les adolescents ne sont peut-être pas le cœur de cible d’un long-métrage comme celui-ci puisqu’on y parle de thèmes très adultes et sérieux tels que l’alcoolisme, le fétichisme, l’extrémisme religieux, la dépression, l’homosexualité ou encore l’Alzheimer. Cela peut sembler d’ailleurs beaucoup pour un seul film mais la manière dont le script les aborde ici est pourtant fluide et ordonnée. En somme, on ne fouille pas ces sujets de façon très approfondie mais le tout forme un ensemble thématique tout à fait digeste et pertinent en plus d’être très adapté à notre époque. C’est bien amené, sans forcer, et cela permet de les aborder d’une manière assez légère malgré la tonalité noire de l’ensemble. Un pot-pourri des maux et souffrances de notre époque mis sous cloche qui rend ce film d’animation précieux et unique.
L’australien Adam Elliot, à qui l’on doit l’acclamé et oscarisé « Mary & Georges » continue donc son exploration des symptômes malheureux de notre temps et de nos sociétés occidentales par le biais de l’animation qu’il affectionne. Il se dégage un énorme souffle de nostalgie de ce « Mémoires d’un escargot » ou, devrait-on dire, de mélancolie. Les teintes sont brunâtres et grises mais le visuel est enchanteur et fourmille de détails amusants à déceler. L’animation est en tous points superbe et son côté presque artisanal lui confère beaucoup de charme. Malgré le côté sombre et presque nihiliste qui se dégage de cette œuvre, de nombreuses notes d’humour sont présentes pour pallier à la sinistrose du sujet et de l’atmosphère générale. Pas un humour noir ou cynique mais un humour sincère qui occasionne pas mal de rires francs et bievenus. Durant une heure et demie, on suit l’histoire de la jeune Gracie à qui la vie ne fait pas de cadeaux à travers l’évocation de ses malheurs qui s’enchaînent. En filigrane, le film pointe du doigt certains travers contemporains avec beaucoup d’acuité. Heureusement, la fin est positive et plus lumineuse, ce qui permet de ne pas quitter la salle avec l’envie de déprimer. « Mémoires d’un escargot » est donc un petit bijou d’animation rare mais à ne pas mettre sous tous les yeux.
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