Memory
6.7
Memory

Film de Michel Franco (2023)

La magie du cinéma est à l’œuvre ! Improbable sur le papier, cette romance douce-amère est sublimée par le talent de ses interprètes et de son réalisateur.

Sylvia (Jessica Chastain) est fragile, mais résiliente. Cette mère célibataire célèbre ses 13 ans de sobriété aux alcooliques anonymes, s’occupe de son adolescente de manière un peu trop protectrice et travaille dans un foyer d’accueil de jour. Un jour, Sylvia rencontre Saul (Peter Sarsgaard), un homme souffrant d’Alzheimer précoce. Paradoxalement, Saul va faire resurgir des souvenirs traumatiques chez Sylvia.

Lorsque Sylvia affronte son passé et ses affaires familiales, le film aurait très bien pu sombrer dans le mélodrame plombant et larmoyant. D’autre part, la relation sentimentale naissante entre Sylvia et Saul aurait pu paraître aussi improbable que mielleuse. Et pourtant, Memory est un bijou de romance douce-amère, au postulat improbable, mais qui fonctionne grâce à la magie du cinéma et au talent présent tant devant que derrière la caméra.

La rencontre et la complémentarité entre une mémoire pesante et un passé qui s’efface paraissent très théoriques de prime abord. Pourtant, on y adhère pleinement. Cette réussite s’explique grâce à la justesse des personnages de Saul et Sylvia. Ils sont parfaitement incarnés par Peter Sarsgaard (récompensé à la dernière Mostra de Venise) et Jessica Chastain. Alors qu’ils auraient facilement pu tomber dans l’excès, leur retenue et l’intériorisation de leurs sentiments les rendent aussi sensibles que crédibles. Ils sont minutieusement décrits de manière purement cinématographique, car le réalisateur Michel Franco excelle à dévoiler ses protagonistes de manière implicite, plus par les situations qu’ils traversent que par des surexplications poussives. Cette intelligence « cinématographique » se retrouve également dans l’utilisation de la musique. Aucune bande-originale ne vient surligner les émotions dans Memory, à l’exception d’une utilisation diégétique remarquable A Whiter Shade of Pale. Même lorsque le mélodrame frise le too much dans des scènes de règlement de compte familial, le film retombe parfaitement sur ses pattes et ses scènes a priori un peu clichées sonnent finalement très justes dans le parcours des personnages.

Ce qui aurait pu être une romance niaiseuse ou un mélodrame balourd s’avère être donc une expérience délicate et réconfortante qui imprégnera à coup sur nos souvenirs de cinéma.


el_blasio
8
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le 9 mai 2024

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