Fondée en 1930, la maison Troisgros détient 3 étoiles Michelin depuis 55 ans. Un empire de la gastronomie qui dure depuis maintenant 4 générations (!).
A 93 ans, Frederick Wiseman ne semble toujours pas décidé à raccrocher les gants (pour notre plus grand bonheur). Pour son quatrième film sur le sol français, après La Comédie-Française ou l'Amour joué (1996), La Danse, le ballet de l'Opéra de Paris (2009) & Crazy Horse (2011), cette fois-ci, il quitte Paris pour le département de la Loire et plus précisément à Ouches, dans le restaurant triplement étoilé "Le Bois sans Feuilles".
Le réalisateur américain nous invite à un voyage gustatif qui ne cessera de mettre en éveille nos papilles. Le rdv est pris dans l’un des restaurants de la célèbre famille roannaise, à travers un film fleuve comme seul Wiseman sait les faire. Une odyssée gastronomique de 4h où l’on ne voit pas le temps passer. D’ailleurs, à peine vient-il de démarrer qu’il parvient déjà à nous mettre l'eau à la bouche.
Menus-Plaisirs - Les Troisgros (2023), c’est une immersion à travers laquelle on découvre tous les corps de métier (ou presque) qui peuvent avoir un lien avec la restauration. Pendant que la fourmilière s'active dans les cuisines, c’est une toute autre ambiance qui se prépare en salle, avant l’arrivée des premiers clients (la disposition des couverts au millimètre près vient contrebalancer avec l’effervescence qui peut régner derrière les fourneaux). Si le film met en lumière le travail de la famille Troisgros, leurs proches collaborateurs ne sont pas en reste, notamment le sommelier (où l’on apprend que certaines de leurs bouteilles sont vendues 5000€, ce qui n’a rien de délirant quand on sait que les menus oscillent entre 150€ et 570€). Bien évidemment, toute la brigade (l’équipe de cuisiniers) est mise en valeur, les chefs, les seconds, les chefs de partie ou encore les commis. Plus tard, on fera même la rencontre des différents intermédiaires ou fournisseurs, tels qu’un maraîcher, un éleveur de bovins, de brebis, un affineur ou encore un vignoble. Un restaurant aussi étoilé ne peut pas faire l’impasse sur les produits frais et locaux, comme vient nous le rappeler le documentaire. Les commis vont cueillir des plantes aromatiques dans la forêt voisine et cueillent certains légumes à même le potager du restaurant.
Ce film vient (à juste titre) nous rappeler pourquoi l’art culinaire fait partie du rayonnement de la France à l’international. Entre raffinement et élégance, c’est un véritable ballet qui s’opère en cuisine et une torture visuelle tant chaque plan nous donne envie de goûter à tous les plats. C’est passionnant de bout en bout et nul besoin d’être un féru de cuisine pour y adhérer (la preuve, je ne cuisine pas), on est happé par ce qu’il se passe à l’écran et on n’en décroche pas un seul instant. Pendant 7 semaines, Wiseman aura su capter à merveille l’élaboration et la création de ces mets d’exception, comme s’il s’agissait de la grande joaillerie.
Nous sommes à la fois les témoins d’un voyage gastronomique d’exception et le passage de relais entre deux générations (entre Michel et son fils aîné César). On en ressort lessivé par tant d’appétit et on en regretterait presque qu’il n’y ait pas eu de projection en "odorama" (ça aurait été une jouissance olfactive).
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➽ Intégrale Frederick Wiseman