Dans le cadre de Cinexpérience #13, j'ai pu découvrir (dans tous les sens du terme puisqu'on ne sait pas ce qu'on va voir avec Cinexpérience) ce "Merci, patron" ainsi que l'association Fakir, fondée en 1999 à Amiens. Ce documentaire raconte l'histoire de François Ruffin, leader de Fakir, parti en croisade pour réhabiliter le dialogue entre LVMH et les petites gens mis à la porte lors des fermetures d'usine : en effet, M. Bernard Arnault ne peut qu'être un humaniste et un grand homme selon François et il faut rétablir la discussion pour apaiser les âmes. Engoncé dans son T-Shirt "I ♥ Arnaud", il part rencontrer, notamment, la famille Klur.
Honnêtement, pendant le premier quart d'heure de ce film, je me suis demandé ce qu'était ce "truc". Du second degré, très bien, mais c'était mal filmé, mal joué, pas toujours techniquement au point (la première séquence est floue - ou plutôt le point a été fait 2 à 3 mètres derrière le protagoniste, c'est ballot pour une première impression !).
Puis, je me rends compte que c'est un documentaire (puisque je vous dis qu'on DECOUVRE !). Ceci explique en partie cela. Et surtout, le "scénario" commence enfin à décoller. J'utilise certes des guillemets mais ce qu'ils ont vécu est digne des plus grands films policiers ! Sans trop dévoiler, Ruffin et son équipe vont aider la famille Klur en forçant la main à LVMH (de façon à la limite de la légalité : j'ai eu peur des conséquences pour les Klur, d'ailleurs) qui leur enverra le "Commissaire" pour négocier.
Le COMMISSAIRE !
Comme le disaient les 2 membres de l'équipe présents, ils ont eu une "chance" folle de tomber sur un tel énergumène : il a écumé tous les poncifs des films d'espionnage, à tel point que je me suis un moment demandé si ce n'était finalement pas un documenteur ! Mais non, tout est vrai, tout est filmé.
Mais tourner en dérision LVMH est certes un gros coup et permet d'avoir un impact sur les spectateurs, saluons également l'équipe du film pour avoir monter un film d'1h30 accessible, bien structuré et assez tonitruant à partir des 200h de rush qu'ils ont filmé ! Ça a dû être un travail de fourmi.
Au passage, comme cela me sera confirmé, une de leurs influences est bien sûr le travail pamphlétique de Michael Moore et surtout de Roger & Me, dans lequel Moore dénonce les actions du PDG de General Motors sur sa ville natale de Flint. Parce que, évidemment, on parle de documentaire mais il s'agit d'un pamphlet contre M. Arnault et LVMH.
Malheureusement, je n'ai pas pu m'empêcher de penser qu'aider 1 famille, c'était une bonne chose, mais quid des autres ? Quid de ces centaines voire milliers d'autres personnes qui ont été mises sur la paille ? Les intervenants parlent de plusieurs suicides dans leur entourage. En guise de réponse à ma question, les membres de l'équipe m'ont répondu qu'ils en étaient conscients, qu'ils faisaient ce qu'ils pouvaient et qu'ils espéraient que ce film servirait de sonnette d'alarme et de déclic pour d'autres. Et de façon plus terre-à-terre, c'est aussi la seule famille des 200 personnes licensiées lors de la fermeture de l'usine ECCE dont les 2 parents étaient à l'usine et donc impactée de plein fouet par cette fermeture.
Je dois avouer que, sans Cinexpérience, je ne serais certainement pas allé voir "Merci Patron", mais je ne regrette absolument pas : il est éloquent avec l'utilisation de beaucoup d'archives pour pointer du doigt les contradictions de M. Arnault, une équipe qui en veut, un ton faussement léger et humoristique, des larmes et même de l'action ! Mon seul VRAI regret : je suis peut-être pessimiste et j'espère de tout cœur me tromper, mais je ne pense pas que cela changera grand-chose.