Aaaaah mais oui ! Ah mais je dis oui, et cela sans hésiter ! Moi, ce que j’adore avec des films comme ce « A Message From The King » c’est qu’ils savent être simples, directs, clairs et précis. La structure est classique, certes, mais ce n’est pas un désavantage quand, comme c’est le cas ici, on a affaire à un réalisateur et deux scénaristes qui maitrisent clairement leur sujet. Au contraire, pour ce « A Message From The King », c’est même tout l’inverse. C’est justement parce qu’on a à faire à un trio qui maitrise sur le bout des doigts les codes du genre abordé que j’ai trouvé ce film d’une efficacité redoutable. Ce film, c’est un bijou d’écriture et de mise en scène. Dès la première scène, le mystère est posé sur ce personnage principal qui débarque à L.A. Qui est-il ? Quelle est sa véritable motivation ? On sent tout de suite qu’il nous cache quelque-chose. Et pour le coup, ça marche, parce que le personnage a suffisamment de subtilité dans son jeu pour qu’on se prenne tout de suite d’affection pour lui, même si d’un autre côté une part de nous-mêmes sent qu’il existe chez lui une zone d’ombre dont il va falloir qu’on se méfie. Bah ouais – j’en ai conscience – ça ne tient à rien, et pourtant toute la force et l’efficacité du film tiennent là-dessus. On ne perd jamais de temps. A peine une scène se finit que déjà la piste sonore de la suivante se fait entendre. Chaque scène est courte, allant à l’essentiel, et sachant fournir rapidement l’indice qui permet de justifier le basculement à la scène suivante. Chaque étape est très efficace, car chacune d’elle distille des informations supplémentaires qui nous permettent de peaufiner la perception que nous nous faisons de ce personnage principal si mystérieux, de cette intrigue qu’il cherche à résoudre, mais aussi de cet univers dans lequel il évolue… Et il joue un rôle important cet univers ! Pour le coup, le film nous donne l’occasion de voir L.A. du point de vue d’un étranger ; le point de vue d’un homme qui ne court pas après un rêve illusoire… Ce regard désabusé mais ambigu, que chaque personnage alimente à sa façon, participe clairement à la mise en place de cette anti-fable sur l’American Dream qu’entend nous proposer ce « Message From The King ». Franchement, sur quasiment tous les points, Fabrice du Welz fait un sans faute. C’en est presque dommage que sur sa seconde partie, ce film en devienne davantage perfectible. Perfectible en termes de réalisation tout d’abord : les quelques scènes de bagarres sont par exemple bien trop agitées à mon goût. Ça les rend pas mal illisibles. Pour moi ça ne colle pas vraiment avec le reste de la réal qui est très posée. C’est dommage parce que pour moi c’est vraiment la seule fausse note du film en termes de mise en scène. Et pareil, en termes d’intrigue, le film qui savait se montrer logique de bout en bout sur toute sa première moitié sombre parfois dans la facilité en se permettant quelques « heureux hasards ».
(Le camionneur qui débarque au moment où les deux ripoux s’apprêtent à tuer Jacob : quel heureux hasard ! Que les flics – pourtant payés cinquante plaques chacun – décident d’abandonner leur contrat sur Jacob au lieu de chercher à finir le boulot : quel heureux hasard aussi ! Que les bad guys mettent des plombes avant de se motiver à remonter la piste de la voiture et de l’appart de Jacob : ça aussi ça fait un sacré heureux hasard !)
Alors certes, ce ne sont là que des petites facilités scénaristiques pour faciliter le déroulement de l’intrigue. Et vu qu’elle est riche, je ne m’en plains certes pas outre mesure. Mais bon, ce genre de facilités, je trouve aussi que cela amenuise le pouvoir de l’intrigue. Quand on sent qu’au contraire les auteurs s’infligent de vrais contraintes draconiennes de vraisemblances, le ressenti n’est pas le même je trouve. Mais bon, franchement je pinaille parce que, dans l’ensemble, ce film est quand même d’une sacrée bonne facture. La justesse de la fin, qui sait entretenir jusqu’au bout l’aspect « multifacettes » du personnage principal, a su me faire oublier ces quelques menues approximations pour me ramener à l’essentiel, c’est-à-dire le fait que j’ai grave adoré ce film. J’avais aimé Fabrice du Welz pour son « Calvaire » ; je n’avais pas osé voir son « Vinyan » ni les autres longs-métrages qui avaient suivi. Mais je peux vous dire que son « Message From A King » est, me concernant, très bien passé. La prochaine fois, Fabrice, je ne t’oublierai pas.