Le sacre de l'été
Le plus immédiatement troublant devant Midsommar, c'est sans doute – comme à peu près tout le monde l'aura relevé – de se retrouver face à une œuvre horrifique toute faite d'été, de ciel bleu, de...
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le 3 août 2019
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Je ne m'attendais à rien.
Je savais juste que c'était une proposition horrifique se déroulant principalement en plein jour.
Il n'en fallait pas plus pour me décider à prendre une place.
Je précise que je n'avais pas encore vu Hérédité, et que je ne connaissais pas Aster.
Le coup de téléphone et les pleurs de Florence Pugh en OFF m'ont immédiatement plongé dans le film, et la scène qui suit avec les pompiers, fait parti des scènes de film qui m'ont le plus marqué à ce jour.
J'en ai d'ailleurs gardé le souvenir d'un plan séquence, mais le deuxième visionnage m'as fait me rendre compte que ça n'en étais pas un, preuve que la mise en scène m'as totalement absorbé.
Cette sensation, que l'inévitable va nous être dévoilé lentement, avec cette corde de violon, elle aussi lentement griffée (Gassed de Bobby Krlic, brillante OST), et cette interprétation de Florence Pugh, qui nous fait sentir la douleur physique qu'une telle tristesse peut faire ressentir....
S'en suit des coups de tambour et l'agitation des violons qui nous plonge brutalement dans l'univers qu'Aster va ensuite nous dévoiler.
Whoah. 10 minutes de film (même pas ?), et mon être tout entier est comme tétanisé face à l'ampleur de cette scène d'exposition magistrale, scène d'ouverture vers un voyage qu'on sent malsain au possible.
Le reste du film est malheureusement moins explosif que cette ouverture, mais il n'en est pas moins déroutant.
(Après avoir vu Hérédité, j'en tire finalement la même conclusion. La scène avec la petite soeur est tellement puissante, tellement choquante que le reste du film souffre de ne plus l'être autant.
Mais ces séquences suffisent à elles-même pour considérer ces films comme marquants.)
Je pense que j'ai eu de la chance de ne pas avoir vu Héridité avant Midsommar, et que j'ai ainsi pu profiter de la découverte de cette ambiance malaisante, cette sensation que rien ne doit être cru, et que quelque chose de très sombre se trame, ce qui semble être la patte d'Aster.
Visuellement, le film est un bijou.
Je pense notamment à ces plans quand tous les protagonistes sont attablés, et qu'un silence pesant règne.
Aux quelques fleurs qui bougent sous l'effet des psychotropes qu'ont ingérés les protagonistes.
Le film prend le parti de nous faire découvrir ce milieu et cette secte du point de vue de l'héroïne, ce qui renforce cette ambiance malaisante.
On sait que ce qui se passe n'est pas correcte, que le danger règne, et qu'une idéologie sans doute arriérée imbibe les individus qui sont tout habillés de blanc.
Mais on s'y sent bizarrement bien.
Entouré, compris, détendu.
Comme si on se laissait la possibilité de penser que c'est peut être eux qui ont raison d'agir de la sorte, dans le monde dans lequel nous vivons, qui peut vite laisser place à la douleur et à la peine, mais surtout à la solitude, quand on se laisse noyer sous le quotidien.
Et c'est exactement ce que ressent le personnage de Florence Pugh, à peine arriver la bas.
Son instinct lui crie que danger il y a, mais elle ne peut s'empêcher d'être attiré par ce mode de vie qui semble si bon, si paisible pour ceux qui l'ont adopté.
En mal de soutien, elle va le trouver chez ceux qui sont sensés être des gens atrocement différents.
Petit bémol, (voir gros ?) les personnages qui accompagnent Dani souffre de n'être vraiment que des archétypes, et on sent bien que le développement des personnages a été consacré à celui de Florence Pugh, et moins aux autres.
Forcement, le jeu d'acteur suit, et cela éloigne le film de ce ton si particulier qu'il aurait pu complètement avoir, pour nous rapprocher du film d'horreur américain typique, avec le citadin qui ne cherche pas à comprendre et qui essaie d'imposer sa vision et son mode de vie aux locaux, qui le prennent comme un manque de respect.
Sans spoiler, la fin, forcement affreuse, a quelque chose de pourtant apaisante, qui en vient à nous interroger sur notre façon de penser.
Comme si elle justifiait les actes de cette secte, comme si ce n'était qu'un moment nécessaire pour enfin parvenir à la paix.
Comme un juste retour des choses.
Et la ou on pourrait penser qu'un tel film nous laisserait dans un sentiment de malaise, de peur, de traumatisme, il nous laisse avec ce sentiment que ceux qui ont un coeur pur finissent toujours par triompher, que le bien gagne sur le mal, tout en lui empruntant certaines idées, certains comportements.
Bref, une fin qui laisse contemplatif, pensif, une fin poétique, très loin de celle qu'on aurait pu imaginer au sortir de la séquence d'ouverture tragique.
Mention spéciale pour la petite séquence de flashback de Dani, qui rêve de séance TV en famille lorsqu'elle est sous psychotropes. Elle m'as glacé le sang.
Un métrage juste, qui touche la ou ça fait mal, mais qui sait remettre le spectateur dans le droit chemin, et qui ose interroger les principes mêmes de l'interaction humaine et du consentement sous un nouveau prisme.
On ne se sent jamais serein, jamais sur de soi et de ce qu'on pense, on se remet en question sur notre façon de condamner ou pas ce qu'on voit à l'écran, et ce lien avec le spectateur, qui nous plonge complètement dans le film, est sans nul doute une immense qualité du réalisateur.
Maintenant que j'ai vu Hérédité, je trouve qu'il manque à ce premier film d'Aster ce qu'il a trouvé (mais qui n'est pas encore totalement abouti) avec Midsommar, c'est à dire cette ambiance pesante, au rythme lancinant et identique de bout en bout, tel un voyage dont on ne sortira pas indemne, qui s'éloigne des productions américaines aux ficelles si connues qu'elles sont déjà lassantes à peine devinées.
Quand certains considèrent Jordan Peele comme le cinéaste du renouveau horrifique, peut être qu'ils devraient se tourner vers les films d'Aster, même si la démarche est différente.
Il ne reste plus qu'a attendre la suite de l'oeuvre d'Ari Aster, qui, a n'en pas douté, va devenir un cinéaste qui ne nous laissera jamais indifférents, et surtout, jamais tranquille.
Et cela contribue encore à faire d'A24 une société terriblement excitante.
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Créée
le 20 août 2020
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