Troisième côté d'un triangle visionnaire dont il dessine aujourd'hui la forme avec Métropolis et Blade Runner, Minority Report s'impose comme le grand film de science-fiction que le cinéma attendais depuis des décennies. A l'égal de ses prédécesseurs, il conçoit notre avenir comme le prolongement démesuré de notre présent. La circulation de l'information, l'omniprésence de la publicité, l'obsession sécuritaire, le rôle de la police, les dérives de l'institution judiciaire, la main mise sur les libertés individuelles... Tous ces thèmes d'une actualité brûlante sont exploités jusque dans leurs implications les plus extrêmes avec une virulence graphique et politique à laquelle Steven Spielberg ne nous avait guère habitués. Aux commandes d'une mise en scène qui lui permet de se réinventer de fond en comble, il tire de ses comédiens des accents inédits, fusionne émerveillement et réflexion dans un même creuset d'émotions, et nous offre, loin devant La Liste de Schindler ou le Soldat Ryan, son oeuvre la plus forte, la plus novatrice et la plus adulte.