Rien de tel qu'un petit retour au bercail, histoire de semer les germes d'un avenir à réinventer ? C'est en tout cas sur cette base que démarre Miséricorde d'Alain Guiraudie. Jérémie revient dans son village d'enfance pour l'enterrement de son ancien patron. Les choses vont prendre une tournure pour le moins étrange quand s'y ajoute une disparition inexpliquée et le comportement ambigu voire menaçant de certains voisins...Les amateurs de thrillers se sentiraient dans leurs pantoufles, mais la "Guiraudie's touch" mène ce charmant programme dans une autre direction. Un agréable trouble enveloppe les péripéties de ce qui s'apparente à une farce macabre teintée de spiritualité. La caméra du conteur reste à distance raisonnable de ces personnages, rendant l'irruption du burlesque burlesque d'autant plus réussie, le metteur en scène pousse le spectateur à s'interroger ce qui se joue devant lui. Le petit train-train en place au sein de cette bourgade de l'Aveyron (balades forestières, cueillettes aux champignons) est-elle perturbée par l'arrivée de Jérémie, ou est-ce lui qui se laisse petit à petit entraîner par cette mécanique ? À nous d'en juger et ce ne sera pas facile avec cette galerie de personnages dessinés en creux et superbement interprétés (en particulier Félix Kysyl et Jacques Develay, tous deux formidables). Et si on commence à en dévoiler certains tournants, bon courage...Le film s'assume comme un objet simple et retors à la fois. À l'instar de ces notions de désir et d'intentions qu'il observe avec malice, Miséricorde se tient à une logique débridée sinon insoluble. Ce qui n'empêche nullement de s'en payer une bonne tranche.