Lors de la remise de la Palme d'Or, je me souviens avoir entendu certains critiquer Moi, Daniel Blake, jugeant d'autres œuvres en compétition plus aptes à être récompensées, et le fait que ce soit le deuxième titre de Ken Loach en a fait rager plus d'un. Il est selon moi indispensable d'aller voir ce film, qui dépeint de façon très simple voire documentaire des situations de précarité réalistes et accablantes. Ken Loach dresse le portrait d'un cinquantenaire, veuf et sans profession, ayant subi une crise cardiaque récente et ne pouvant nullement reprendre le travail au vue de sa santé critique. Jugé inapte au travail par le service médical, il se retrouve néanmoins à rechercher un emploi sous peine de sanction de l'aide sociale, si il veut recevoir un revenu lui permettant de (sur)vivre. Critique virulente du système administratif et des injustices que subissent les plus démunis, Moi, Daniel Blake est un cri de désespoir qu'il faut voir pour analyser cette société qui pullule de règlements, de lois et de fonctionnaires abrutis par l'ordre, ignorants tout du calvaire labyrinthique qu'ils imposent. Certaines scènes sont consternantes et résonnent directement dans notre quotidien. Ken Loach ne juge pas ses personnages et ne rentre jamais dans le stéréotypes. Les acteurs inconnus sont d'une simplicité hallucinante et décrient une réalité sourde qui dérange, à laquelle on ne se mêle pas si on y est pas confronté directement. "Les pauvres sont responsables de leur pauvreté. Voilà qui protège le pouvoir de la classe dominante", à partir de ses mots du réalisateur, tout est dit ! Le cinéma pointe ici du doigt une réalité sociale et politique. C'est un acte fort, courageux, dérangeant mais indispensable pour ouvrir les yeux à certains. On en a besoin pour ne pas perdre pied dans un monde où l'incompréhension et la consternation sont de rigueur. Même s'il y a quelques longueurs par-ci par-là, on s'en moque car la critique est tellement aiguisée et puissante qu'on en sort différent, traversé par des questions enfouies ou refoulées qu'on osait pas se poser. Je comprend la Palme d'Or, je remercie cette Palme d'Or, je revendique cette Palme d'Or !