Très bon biopic consacré à la patineuse américaine Tonya Harding, mais on passe (de peu) à côté d'un petit chef d'œuvre, car le film aurait pu être encore meilleur.
Le réalisateur australien Craig Gillepsie opte en effet pour une narration caustique et décalée, sur le principe du "faux documentaire".
Ce parti-pris fonctionne parfaitement durant la première partie, consacrée à l'enfance malheureuse de Tonya dans le giron de sa mère cruelle (Allison Janney, excellente), au sein d'une banlieue blanche et pauvre de Portland, échantillon représentatif de l'Amérique redneck.
Le choix d'un regard décalé permet notamment de faire passer la violence terrible qui accompagne les jeunes années de la patineuse, auprès de sa mère puis auprès de son mari Jeff Gillooly (Sebastian Stan).
L'occasion de souligner la prestation époustouflante de Margot Robbie dans le rôle-titre : la star australienne, aussi convaincante dans la grâce que dans l'émotion, réussit la gageure de faire oublier sa grande beauté pour se fondre dans ce personnage de vilain petit canard.
A contrario, le décalage et l'humour à froid apparaissent moins pertinents dans la deuxième moitié, lorsque le récit se concentre sur le fameux fait divers qui fit la célébrité de Tonya Harding (l'agression de sa rivale Nancy Kerrigan peu avant les JO de Lillehammer 1994).
Le film accentue le côté "pieds nickelés" des malfrats ayant participé à cette agression, qui s'apparentent à de véritables caricatures, des pantins dignes de figurer dans une comédie absurde des frères Coen.
A titre personnel, j'aurai nettement préféré une reconstitution des faits plus claire et plus rigoureuse, d'autant que le choix d'un montage non-linéaire engendre une certaine confusion narrative.
Malgré ce dernier tiers plus laborieux, "I, Tonya" reste un biopic tout à fait recommandable, porté par une mise en scène inspirée, à l'image des scènes de patinage spectaculaires et immersives, et souligné par une bande originale entraînante, qui comblera les amateurs de tubes des années 80.