Ce film de François Ozon, qui malgré toutes ces qualités visuelles et musicales pour retranscrire un Paris de la Belle Epoque, ne parviens pas à s'extraire de la culture woke dans laquelle nous baignons aujourd'hui. Attention, je ne dis pas qu'il s'agit toujours d'une mauvaise chose, mais à trop vouloir flatter les partisans de la "culture éveillée" (comme si tout le reste du monde était réactionnaire), celui-ci tombe dans des facilités scénaristiques qui font tomber à plat le scénario, pourtant astucieux au départ. En effet, nous suivons un couple de "colocatrices" (mince, moi aussi je m'y mets), une jeune avocaillonne, Pauline, et son amie Madeleine, une actrice à la dérive, qui, au bord de l'expulsion de leur domicile, choisissent une sulfureuse affaire de meurtre à laquelle cette dernière serait liée, pour plaider, au nom des droits des femmes naissant, la culpabilité et la légitime défense. Cela aura pour conséquence d'émouvoir l'auditoire, la déclarer non coupable, et curieusement, de lancer la carrière des demoiselles. Sauf que, ni l'une, ni l'autre ne sont coupables de ce crime. Si, de premier abord, cet incipit a de quoi déstabiliser par son aspect joyeusement politiquement incorrect (le meurtre d'un vieux producteur vicelard par une jeune ingénue semble parfait pour lancer une carrière et la couronner de succès), le film flirte de manière tellement désinvolte avec les courants néoféminismes, que cela en devient vite gênant, voir caricatural. En effet, ici, les acteurs masculins incarnent tous des personnages insipides et opportunistes (à l'image du jouvenceau qui sert de fiancé à Madeleine, ou Dany Boon et son accent marseillais), sinon bêtes comme leurs pieds (voir l'image du juge d'instruction complètement abruti joué par Fabrice Luccini). On passe ainsi par toute une palette de personnages mâles qui ne sont là que pour montrer à quel point les femmes de ce récit sont malignes, astucieuses et débrouillardes. Seulement, cela rend le récit d'une lourdeur et parfois si attendu, que cela en devient indigeste, et au bout d'un moment, on n'y croit plus une seule seconde. Que se soit le beau-père (Dussollier), qui refuse sa belle-fille pour son passé criminel et change d'avis en deux temps trois mouvements, l'avocat paternaliste et mysogyne (superbement incarné par Michel Fau), qui aide à prendre en pitié la pauvre condamnée, ou encore le journaliste de presse à scandale, qui pour vendre sa feuille de chou, n'hésite pas à passer outre son éthique journalistique sans vérifier ses sources, et écrit bêtement tout ce que lui dit la jeune ténor du barreau à propos de l'affaire. C'est vraiment dommage parce que le film brille par ces qualités formelles (image et jeu d'acteur), a parfois de bonnes idées (notamment le personnage formidablement interprété par Isabelle Huppert, une ancienne actrice du muet qui va mettre un peu de zizanie dans le complot des demoiselles), mais pêche par excès de zèle sur son fond. En résulte une sympathique comédie pas vraiment fine ni révolutionnaire qui nous fait bien comprendre que le monde se porterait bien mieux sans les hommes, car au cas où nous ne l'aurions pas compris, la fin du film achève de nous le rappeler, en rejouant de manière théatrale le soit-disant meurtre commis, que la foule acclame. Le message est clair. Tout film est politique, certes, mais le féminisme mérite mieux en matière d'éloge que le rabaissement de tous les hommes.