Détester un personnage donne difficilement envie d'apprécier le film. C'est un constat.
Il s'agit donc de surmonter ce sentiment pour un personnage et de le relativiser en se rendant compte que si le film nous fait aimer ou haïr ses protagonistes, c'est qu'il n'est pas totalement raté.
Et qu'il est même efficace.
En tous cas ici, c'est sûr je déteste le personnage.
Or mon problème c'est que, à l'inverse de ce que voudrait surement la réalisatrice, je ne déteste pas le personnage qu'interprète Cassel. Mes sentiments négatifs se sont plus violemment portés sur celui qu'interprète Bercot.
Hystérique, gamine, insupportablement indécise. Toute en rires hurlés et en pleurs morveux.
Emmanuelle Bercot, qui ne passe pas une seule scène sans avoir le visage humide, est en cela parfaite qu'elle incarne viscérallement son personnage. Elle fait ce qu'on lui demande : pleurer et rire aux éclats.
Tiens, la palme.
Cassel lui est sur un autre registre. Tout en sourires charmeurs, en regard perçants, en pulsions animales refoulées. Son jeu est impeccable, toujours sur la lame du rasoir, oscillant sans cesse du bon ou du mauvais côté. Il est le bad guy, l'immature, le cynique, le serpent du film.
Il est là pour que rien ne tienne en équilibre. Il joue avec tout le monde. Y compris nous.
Il est rejoint dans sa performance par Louis Garrel qui, dans un rôle secondaire assez délicat, tient parfaitement la route et se fait drôle voix de la raison.
Il nous offre un peu d'espoir dans ce film peuplé d'extravagants, de gamins dans des corps d'adultes, à la dérive sur les mers d'Egoïsme et d' Immaturité.
Car c'est cette foule que met Maïwenn en scène.
D'où un scénario insupportable sur une génération pourrie de l'intérieur.
Enfin mise en scène, peut être est-ce là un grand mot. Car sans le talent des comédiens, que resterait-il de ce "Mon Roi" ? Une impression de laideur terrible, qui plonge le film dans une absence totale de style (à l'exception peut être que quelques plans remarquables, notons-les : le couple, ébahis, qui tient leur nouveau-né dans les mains, ou encore les dalles lumineuses et colorées d'une boîte de nuit, à l'ouverture du film.)
Scénaristiquement, on ne retient pas grand chose non plus. Ou, tout au moins, pas grand chose de positif. Car le film, en plus d'une absence de pudeur gênante et gratuite qui dévoile ses comédiens (surtout Bercot) dans leur intimité où l'on ne voulait pas forcément aller...) n'est basé que sur un double va et vient qui agace et dévoile vite toutes ses faiblesses et son inefficacité.
Que ce soit ce passage lourdingue entre les souvenirs (qui sont en fait le vrai film) et ses séquences inutiles de rééducation du genou, où Toni, le personnage féminin principal, rencontre des jeunes qui la sortent un peu de son univers, et où la "réparation" de l'articulation (dont on nous offre en prime une ridicule explication symbolique en guise d'ouverture au film) se fait métaphore filée et rébarbative des états d'âmes de Toni au fil de son histoire avec Georgio...
Ou encore ce va et vient qui sans cesse montre les hauts, puis les bas, puis de nouveau les hauts (je vous la fait courte) d'une histoire d'amour, le tout étiré sur deux longues, très longues, TROP LONGUES heures...!
C'est donc avec un véritable émerveillement que l'on accueille la très belle scène finale, finement filmée, qui met fin de la manière la plus délicate qui soit à deux heures de yoyo.

Créée

le 6 nov. 2015

Critique lue 1.2K fois

7 j'aime

Charles Dubois

Écrit par

Critique lue 1.2K fois

7

D'autres avis sur Mon roi

Mon roi
Sergent_Pepper
6

Hystérie of romance.

Maiwenn est depuis quelques films en mesure d’affirmer une tonalité et un traitement suffisamment singulier pour qu’on la reconnaisse. Avec Mon Roi, elle se déleste de l’originalité d’un scénario (Le...

le 6 nov. 2015

106 j'aime

2

Mon roi
eloch
9

Nous ne vieillirons pas ensemble

Ecrire une critique sur un film de Maïwenn n'est jamais une entreprise facile tant la réalisatrice déchaîne les passions. Elle a divisé en effet jusqu'à la Croisette en quête chaque année de films de...

le 20 oct. 2015

70 j'aime

5

Mon roi
Je_en_vert
8

Mon Roi de Cœur qui pique

Paradoxalement, malgré tout ce temps que je passe au cinéma, c’est une chose assez rare que j’attende réellement et impatiemment un film, des mois et des mois à l’avance. Cette pratique...

le 30 oct. 2015

65 j'aime

7

Du même critique

Au boulot !
Charles_Dubois
7

"On prend sur soi."

Il y a au départ la petite histoire qui donne son origine cocasse au film : la rencontre, tumultueuse pour le moins, de François Ruffin avec Sarah Saldmann, chroniqueuse sans grande finesse du...

le 2 oct. 2024

18 j'aime

Les Blues Brothers
Charles_Dubois
5

Critique de Les Blues Brothers par Charles Dubois

Film emblématique d'une génération, The Blues Brothers n'a pas réussi à me convaincre. En tous cas pas totalement. Certes je n'ai pas passé un mauvais moment, j'ai même ri franchement à certains...

le 29 déc. 2015

18 j'aime