Un bon film malgré son condensé de maladresses

J’aime beaucoup les chansons de Charles Aznavour, le timbre voilà de sa voix, ses rythmes qui arrangent le jazz à la sauce française sur des textes qui sonnent juste. Ce petit homme dont les Américains se moquaient : « Aznavour ? Has no voice ! », avait dit l’un de ses collègues les plus célèbres. J’aime ses chansons, mais je ne suis pas un fan du bonhomme. Je le dis d’emblée, ce film est un bon film, surtout pour la génération qui n’a pas connu cet artiste au sommet de sa popularité. Un bon film certes, mais avec beaucoup de maladresses. Le premier quart du film qui compile les images historiques n’apporte rien au propos du film. Inclure un mini documentaire sur le génocide perpétré par les Turcs à l’aube du XXe siècle n’a pas sa place dans un biopic. Les séquences qui se passent durant la guerre et de l’occupation — dans laquelle les parents d’Aznavour ont joué un rôle indéniable — n’apportent que peu de choses, excepté sur la misère d’où il vient. Elles sont filmées comme une série Netflix où même les juifs déportés dans le bus étincelant de propreté qui les emmène vers le funeste destin transporte sa cargaison de futurs sacrifiés tout proprets et endimanchés. Cette forme crée un vrai malaise. Et puis, le film aborde enfin le véritable sujet : les années où Charles Aznavour va se révéler comme un très grand artiste. C’est la partie la plus réussie du film et, rien que pour cela, il faut aller le voir. L’interprétation de Tahar Rahim est exceptionnelle. Il est ressemblant sans être un sosie, crédible dans les gestes, les mimiques et la voix. Les années de maigres succès, les rencontres décisives nous font voir la naissance des « tubes » d’Aznavour. La personnalité de l’artiste est bien traitée. Son appétit de réussite, sa solitude face au succès et l’arrogance du personnage sont parfaitement rendus. Les seconds rôles qui figurent les gloires de la chanson de l’immédiat après-guerre sont excellents. Ici aussi, sans être des sosies, ils font parfaitement illusion et cela fonctionne. Un film à voir malgré ses maladresses.

SaintPol
7
Écrit par

Créée

le 31 oct. 2024

Modifiée

le 31 oct. 2024

Critique lue 17 fois

SaintPol

Écrit par

Critique lue 17 fois

D'autres avis sur Monsieur Aznavour

Monsieur Aznavour
Clmovies
8

Le grand Charles

Quel hommage.J'ai depuis 2 ans plus de 20 ans, et pourtant Charles Aznavour ne m'était avant que le film commence que très peu familier (j'ai d'ailleurs hâte de lire les avis de ses fans...

le 7 sept. 2024

28 j'aime

1

Monsieur Aznavour
Azur-Uno
8

Je m'voyais déjà...

Pré-choisis par le grand Charles lui-même juste avant sa disparition en 2018, les co-réalisateurs Mehdi Idir et Grand Corps Malade (qui a chanté avec Aznavour) nous offrent aujourd'hui ce très beau...

le 25 oct. 2024

20 j'aime

4

Monsieur Aznavour
KingRabbit
3

On va filmer la vie d'Aznavour comme un film de Scorsese. Wesh.

L'intro est horrible, on a tous les poncifs du biopic académique gentillet et pseudo chiadé.On enchaîne une bonne demi heure dans une sorte de buddy movie plutôt sympatoche (sans être révolutionnaire...

le 1 août 2024

17 j'aime

5

Du même critique

Tatami
SaintPol
8

Victoire par ippon !

Il y a des films dont on pressent qu’ils deviendront des classiques dès les premières images. C’est le cas de ce « tatami ». Avant de parler du message transmis par le film, il faut s’intéresser au...

le 14 sept. 2024

7 j'aime

Le Jeu de la reine
SaintPol
8

Magistral !

Je ne sais pas pour vous, mais il m’arrive de passer complètement à côté d’un beau film par pur manque d’attention. C’est ce qui m’est arrivé lors du dernier Festival de Cannes à propos de Firebrand...

le 5 mars 2024

7 j'aime

1

La Peste
SaintPol
6

Salutaire, même imparfait

Le plus difficile face à une telle adaptation, c’est au fond d’oublier le livre mille fois parcouru pour se mettre dans la peau d’un jeune de vingt ans pour qui les métaphores de Camus en 1947...

le 5 mars 2024

4 j'aime

1