J'avais beaucoup aimé « La Famille Tenenbaum », moyennement « La Vie aquatique », adoré « A bord du Darjeeling Limited » et peu goûté à « Fantastic Mr. Fox ». La logique voulait donc que je me régale devant « Moonrise Kingdom », et devinez quoi : ce fût le cas ! J'ai toutefois mis quelques minutes pour m'acclimater à l'univers toujours aussi singulier de Wes Anderson, mais une fois rentré, je n'ai plus quitté le moindre instant cet étrange conte loufoque empreint de poésie et d'émotion. Au-delà de sa science toujours intacte du cadrage, le réalisateur parvient rapidement à créer une osmose entre plusieurs personnages très différents, aussi décalés qu'attachants. C'est assurément le cas des deux jeunes héros, dont la fugue s'avérera être un merveilleux moment de cinéma, éloge d'une enfance à la fois sensible et insouciante découvrant ses premiers émois amoureux. Ces derniers sont entourés par une galerie de seconds rôles étonnants, interprétés par des acteurs aussi épatants que parfois inattendus (les habitués, Bill Murray et Jason Schwartzman, sont pour l'occasion entourés par Bruce Willis, Edward Norton, Frances McDormand, Bob Balaban, Tilda Swinton et Harvey Keitel !), apportant chacun sa touche personnelle à une histoire aux apparences banales qui, sous l'impulsion de son metteur en scène, devient un récit hors-normes, aussi drôle par moments qu'empreints de mélancolie à d'autres, où le monde des enfants s'accorde harmonieusement avec celui des adultes, à l'image de cette colonie scout assez irrésistible. Il n'est toutefois pas aisé de résumer avec des mots une œuvre à la beauté aussi étrange, à la bande-originale aussi merveilleuse (Françoise Hardy inclus), au ton aussi délicat que tonique : n'hésitez donc plus et précipitez-vous sur ce qui est assurément l'un des bijoux de 2012, et peut-être le plus beau film de son auteur, au pire le second. Une petite merveille.