Il peut sembler curieux de voir Georges Lautner, le roi de la Série Noire parodique, s'aventurer dans un polar sérieux à ramifications politiques ; mais après tout, on lui connait aussi le Septième juré qui reste un des meilleurs polars juridiques français, ou le Pacha qui est une Série Noire réaliste et violente. Car ici, l'aspect politique du scénario, la dénonciation de la violence et de la corruption semblent annoncer un film d'Yves Boisset, avec quelques relents à la Jean-Pierre Melville ; mais c'est bien du Lautner, sur des dialogues d'Audiard et à partir d'un bon roman de Raf Vallet.
Cette adaptation plonge allègrement dans les magouilles politico-financières, les dossiers compromettants et les scandales publics, une réalité socio-politique de la France des années 70, traitée avec un certain anarchisme, qui s'est trouvée plus ou moins en prise avec une certaine actualité de l'époque, qu'on a sans doute oublié et c'est tant mieux, mais fertile en scandales et en manoeuvres louches. On constate qu'aujourd'hui, ça n'a guère changé avec toutes ces "affaires" qui touchent les politiques.
Pour servir ce plat bien mitonné, Lautner emploie un Delon qui se révèle très juste et se donne à fond en combattant farouche de la vérité, avec son visage pathétique et fatigué ; il est bien suivi par le toujours excellent Maurice Ronet, Stéphane Audran, Mireille Darc, Michel Aumont, Jean Bouise, Julien Guiomar, François Chaumette, Daniel Ceccaldi et même Klaus Kinski dans un petit rôle de gros pdg excentrique qui tire plein de ficelles. Un film plutôt captivant sur cet univers impitoyable que sont les arcanes de la politique.