Évacuons d'emblée ce qui ne va pas.
Oui, la narration de Moxie est globalement assez mal maitrisée, les conflits qui viennent troubler le récit se résolvent trop facilement et les blessures intimes des personnages semblent assez superficielles. Oui, la mise en scène est celle d'un teen movie d'exploitation et fait ce qu'elle peut avec des acteurs pas tout à fait confirmés. Oui, la plupart des personnages sont plus fonctionnels qu'essentiels et le tout rend un certain manque d'aspérités.
Formellement, on a même du mal à dire que c'est un bon film. Mais tout ça n'est pas important.
Ce qui compte, c'est que ce pur film adolescent assumé est un récit initiatique diablement efficace. Le personnage de Vivian, plutôt bien incarné par Hadley Robinson, est une lycéenne discrète, sérieuse et tenant le conflit le plus à distance possible de son petit monde. Forcée de s'interroger sur ce qui lui tient à cœur pour se vendre à sa future université, elle est parallèlement témoin du harcèlement d'une fille aux principes bien plus encrés. Portée par une colère naissante suite à la publication d'une liste sexiste (et terriblement commune), et par l'exemple de sa mère ex-riot grrrl, elle se lance dans la création du fanzine éponyme. Cet accès de rage transformé en acte militant construit est une description parfaite de l'éveil à la conscience politique. Vivian doute, sonde la pertinence et la réception de son action avec fébrilité, puis assume de plus en plus ses convictions, élevée par le soutien de ses sœurs d'armes, notion-clé et fondatrice de la lutte féministe.
Refus des injonctions sexistes, call-out des violences, représentativité, intersectionnalité, position des alliés... En très peu de temps, tout ce qui remue et transcende la cause féministe est évoqué avec la fraîcheur de la découverte et l'euphorie du groupe. Amy Poehler transmet très bien ça, bien aidée par la B.O. très punk dans laquelle Bikini Kill a une place de choix.
Et même si à l'heure de Twitter et de Photoshop, l'idée de faire un fanzine au ciseaux et à la colle UHU apparaît assez, euh, disons retro, on a qu'un seul espoir : que ce film devienne générationnel !