Mr Turner, ou de l'intérêt de faire un film
Je comprends tout à fait que le réalisateur puisse adorer les peintures de Turner; il a certainement aussi lu et aimé sa biographie, ok. Mais de là à vouloir en faire un film...
Quand c'est aussi haut en couleur que la vie de "Verlaine et Rimbaud" d'accord, quand Mozart est porté par Milos Forman c'est un régal, mais quand l'un des réalisateurs aux films tous plus inutiles les uns que les autres se décide à respecter à la lettre et sans étincelle chaque page de la biographie de Turner, on peut se demander si ça vallait le coup...
Qu'il veuille faire un film sur un peintre ne me dérange pas, au contraire ! sauf que le problème de Mike Leigh, c'est qu'il est incapable de faire un film qui ne se passerait pas à Londres ou Manchester... alors à sa décharge, relater l'histoire d'un peintre anglais célèbre qui soit rocambolesque c'était dur à trouver, sauf peut-être Bacon mais il faut mettre en place un background de guerre mondiale et donc un regard, choisir sur quoi faire l'élipse etc, compliqué. Là on est tranquille, avec un gars qui se promène soit dans les champs, soit dans sa maison. C'est dommage car s'il s'était lancé sur un bon gros taré comme Caravage ou un gars à la Jack London ça aurait envoyé !
Mais non, il voulait son rosebeaf; du coup au final, le bilan de ce film est que la vie de Turner correspond exactement à ce qu'on pouvait penser, à savoir un peintre réputé, plutôt extravagant, avec des jours où il est content, des jours où il est pas content et d'autres jours où on sait pas trop s'il est content ou pas content.
Ah si, pour moi qui m'attendait à un jeune dandy élégant à lavallière dans le genre Chateaubriand de Girodet, il faut admettre qu'il est bien plus crassou que je ne l'imaginait. C'est anecdotique mais là-dessus, le réalisateur s'est dit qu'il tenait son amorce, et joue sur cette image à l'usure avec un travail de bruitage titanesque pour recréer les sons de grognements, de reniflements et de râles les plus abusés du monde.
c'est cependant plus ou moins rattrapé par le jeu d'acteur de Queudver (oui j'ai eu du mal à faire abstraction de Harry Potter) de par son jeu très physique.
D'ailleurs en parlant de choses sales, l'un des autres problèmes du film, c'est que Leigh continue de faire confiance à son compositeur dégueulasse qu'on retrouve à chaque film. Et là, en plus, il s'est acheté un violon ce con. Ca me rappelle les vieilles notes de violons criardes de Rayon Vert de Rohmer, qui était lui aussi capable de nous pondre presque systématiquement des bandes son douteuses.
C'est la première fois depuis Les Trois Mousquetaires de Paul Anderson que je doute de l'intérêt de faire un film tiré d'écrits. Au final, "Mr Turner" m'a fait pensé que quitte à choisir, vous feriez mieux de lire une biographie de Turner que d'aller voir ce film, et que quitte à choisir, vous feriez mieux de tondre votre pelouse que de lire cette biographie tant elle est -banale-.
Mis à part ça la photo est belle, là-dessus d'accord. Et si on s'intéresse au bonhomme, on s'ennuie certainement par moments, mais on est toujours content de voir à quoi pouvaient réellement ressembler un mec comme ça.