Après Kaboom, vu en salles récemment et qui ne m'a pas laissé un souvenir impérissable en dépit de son ton décomplexé et de son carpe diem somme toute réjouissant, j'ai voulu regarder le chef-d'oeuvre de Gregg Araki, celui considéré en tout cas comme tel : Mysterious Skin, adapté du livre de Scott Heim.
Un film qui m'a dérangée, révulsée, fascinée aussi, tant par le sujet plus que troublant et son traitement : la pédophilie et les ravages qu'elle peut avoir sur l'enfant, consentant ou pas.
Neil est un garçon de 8 ans au visage d'ange et aux yeux d'azur, précocement attiré par la sexualité, très conscient déjà de ses désirs, sur lesquels il ne met pas encore de nom et pour cause.
L'entraîneur de base-ball est blond, moustachu, séduisant, affectueux : l'image d'un père qu'il n'a pas eu et bientôt celui d'un amant.
Des images suggérées, presque ludiques : un regard, un souffle, des paroles douces, des jeux partagés, mais derrière toute cette complicité une volonté forcenée de jouissance chez l'adulte et une enfance violée et volée.
Et, en parallèle, l'histoire de Brian, même âge, qui après une partie de base-ball a tout occulté, introverti, bloqué, traumatisé, en quête d'une vérité qui lui fait croire dix ans plus tard à l'existence d'extra-terrestres.
Un film insoutenable tant l'indifférence apparente et l'autodestruction affichées de Neil sont la réponse tragique à cette initiation homosexuelle de l'enfant devenu adolescent, belle enveloppe corporelle mais coquille vide, objet de toutes les convoitises et désormais incapable d'aimer.
Une lueur d'espoir toutefois, ou du moins de tendresse, dans une scène chargée d'émotion, où la voix off de Neil se veut rassurante alors même que Brian, blotti contre lui, ferme les yeux sur l'horreur enfin révélée:
Un des films les plus durs et les plus éprouvants que j'aie pu voir.