Quand Mystery Men sort, le X-Men de la 20th Century Fox et le Spider-Man de Sony en sont encore à l'état de projets, qui durent depuis de longues années. Bien sur, Batman a occupé la décennie, bien que les derniers tiennent plus de la sénilité que de l'adaptation flamboyante. Mais les films de supers-héros au cinéma, ce n'est pas encore ça. Surgie de nulle part, cette improbable adaptation de personnages secondaires d'un comic-book indé, Flaming Carrot de Bob Burden, et qui n'avaient même pas encore eu les honneurs d'un titre à leur nom, surgit sur les pellicules.
Peut-on vraiment parler de parodie à son sujet ? Car Mystery Men ne parodie pas grand chose, faute d'avoir de la matière. Bien sur, des archétypes sont perceptibles. Mais les Mystery Men sont des loosers, des apprentis super-héros aux pouvoirs qui n'ont rien de majestueux, quand ils en ont. Ils vivent dans l'ombre de Captain Amazing, bien plus efficace, mais plus cynique. Ce dernier n'a plus de grands ennemis qui raviraient les publicitaires, alors il en fait libérer un. Ce dernier va se retourner contre lui, et les Mystery Men vont devoir, tant bien que mal, stopper ses plans machiavéliques et, pour ce fait, gagner en confiance.
Avant la réussite de X-Men, l'équipe du film avait compris que le succès d'un film reprenant une équipe reposait sur les relations entre ceux qui la composent. Et c'est ce qui fera tout le sel de celui-ci, comment ces super-z'héros se soutiennent, se chamaillent, et parfois s'opposent. Et surtout, découvrir que ce n'est pas le pouvoir ou le talent qui fait le héros, mais son courage et sa ténacité.
La plupart des séries de films de supers-héros commencent par les origines : comment un tel devient un grand héros. Le film de Kinka Usher, et même son unique, reprend ce postulat mais avec une différence, l'équipe est déjà là, pleine de bonne volontés, mais est clairement amatrice. Il va falloir mûrir et enrôler. C'est clairement ce point qui distingue le film d'une parodie, bien qu'il en contienne certains points de dérisions. Certains gags sont bien trouvés, et accompagnent avec délice la quête de nos héros. Et de manière plus générale, le soin apporté à la création de la ville de Champion City, les décors traversés, témoignent du sérieux du projet.
Néanmoins, on pourra regretter quelques langueurs, et la scène de l'entraînement en fait partie. Car on pressent que le résultat risque de décevoir. Ces Mystery Men ne sont-ils pas plus attachants en tant que loosers que comme super-héros sûrs d'eux ? Les nouveaux costumes qu'ils revêtent alors, plus flamboyants, en deviennent grotesques. Ils vont gagner, c'est sur, je ne vous apprends rien. Mais, quelque part, une partie de leur sympathie a été perdue quand ils deviennent plus sérieux.
Mystery Men est une curiosité à plus d'un titre. Son existence en est une. Il est de plus l'unique film d'un réalisateur qui préfèrera retourner faire des publicités commerciales. Bien que soutenu par une distribution assez étoffée (Ben Stiller, William H. Macy, Hank Azaria, Paul Reubens (Pee-Wee Herman !) ou Geoffrey Rush), le film fera un flop (si vous avez fait partie des 14 112 spectateurs français, vous avez mon respect). Et pourtant, je ne peux que le conseiller. Car Mystery Men possède un cachet certain, dans le baroque de ses décors, dans les personnalités de ses personnages, qu'il est dommage de ne pas avoir retrouvé depuis.