C'est un biopic, mais à la manière Guitry : quasiment une succession de saynètes, avec des dialogues et commentaires extrêmement brillants. Mais comme c'est très bien construit et écrit question scenario, on ne s'ennuie pas pendant ces trois heures.
Comme pour son film sur la Malibran, Guitry utilise la construction en flash-backs, assortis de commentaires, à partir d'une réunion de personnes ayant connu le personnage.
Ici, avec bien plus de moyens : les images en Technicolor sont superbes, il y a de nombreux figurants, et certaines scènes ont été tournées dans des lieux historiques (notamment celle des adieux à Fontainebleau). ....
Pour tout faire tenir en 3 heures, Guitry passe très vite sur certaines périodes, et élude même certains sujets, balayés d'un revers de main par Talleyrand (qu'il interprète, et à qui il avait déjà consacré un film, le Diable boiteux). Il privilégie les instants "privés" (Napoléon et les femmes, ou sa famille) mais sans faire tourner ça au vaudeville. Le film, malgré les bons mots, est nettement moins fantaisiste (malgré un côté romancé) que Si Versailles m'était conté...
Si les batailles sont évoquées brièvement, cela n'empêche pas de le faire de façon spectaculaire, avec de nombreux figurants (même si ça n'a pas, évidemment, pas l'ampleur de la séquence de la bataille de Borodino et de celle de la retraite de Russie dans Guerre et Paix de Bondartchuk.).
On notera quand même que Guitry accorde une certaine importance à l'arrière cour (tractations diplomatiques et préparation du coup d'Etat du 18 Brumaire) et à une décision prise en 1812, le décret de Moscou, soit les statuts de la Comédie Française (toujours en vigueur, même si modifiés pour coller à l'évolution politique et sociale ).
Très belles reconstitution et interprétation, avec pour cette dernière un défilé de vedettes, dont certaines n'ont qu'une réplique... On notera Von Stroheim en Beethoven (lors d'une scène de concert de salon à Vienne) et Orson Welles en Hudson-Lowe...
Un beau spectacle, pas trop hagiographique (la fin du film insiste sur la grandeur du personnage et la trace qu'il laissera dans l'histoire, mais il ne l'idéalise pas trop non plus).