Errant comme une âme en peine, démarcheur désabusé en milieu désertique, Sam s'engouffre dans les méandres des plaines arides Californienne à bord de sa vielle Mercedes, un ours en peluche en guise de copilote, un cadeau d'anniversaire pour sa fille. En tout sens, personne, le vide, l'absence. Des drugstores aux habitats, pas un visage, rien que le silence de ses propres pas. A la radio un unique programme invite les gens à vociférer contre un tueur local. Dans le ciel brille une étoile écarlate. Le monde devient dingue...


Au gré du chemin qu'emprunte Sam, le mystère s'épaissit. Où qu'il cherche à aller, la voix à la radio le poursuit, l'étoile se fait plus oppressante. On étouffe, on écarquille les mirettes devant une vision cauchemardesque qui prend peu à peu tout son sens : Sam n'est pas seul, le monde se referme sur lui et nous avec.


Il me serait compliqué d'en dire davantage car, ce n'est tout bonnement pas possible. Némésis demeure abscons dans chacun de ses plans, rendant l'œuvre aux multiples interprétations des spectateurs. Ce n'est pas plus mal de ne pas pouvoir expliquer tout tant un cauchemar nous apparaît toujours au réveil comme un corps étranger mêlé d'un familier dont on ne veut jamais.


Avec ce film, si le générique intervient pour nous sortir de notre torpeur, peur il y a. Peur et angoisse sont autant de personnages partageant l'affiche avec Sam, notre unique véritable protagoniste (les autres étant relégués à des masques, un dos etc). L'angoisse fonctionne par décharges avec brio sans pour autant se laisser oublier à l'image de l'astre. Elle est là, en fond, assise bien sagement en attendant le bon moment pour surgir. Rares sont les œuvres qui peuvent de targuer de maîtriser à ce point son ambiance.


L'information, les "on dit", tout cela tient également une grande importance dans le long métrage. Elle y prend la forme d'un carnage malsain, d'une justice aveugle. Le harcèlement permanent autour du personnage de Sam passe d'ailleurs par cette information qui va chercher à déformer l'image que l'on peut se faire du héros : tantôt une victime, tantôt un bourreau. On ne sait quoi en penser. Est il humain dans un espace emplit de folie ou bien est il fou dans un milieu qui ne cherche qu'à infliger une vengeance toute méritée ? Un questionnement qui restera sans réponse valable. Encore une fois, c'est aussi bien.


Par ailleurs, on peut reconnaître au film une grandeur dans ses visuels et ses sonorités rappelant les grandes heures de Carpenter et du thriller horrifique, presque mystique. Compte tenu de son mince budget, Némésis s'en sort admirablement, trouvant même quelques parades extrêmement intelligentes comme ce coup de batte qu'un long travelling va rendre encore plus violent sans se vautrer dans la surenchère d'hémoglobine et de gueules cassées. Tout a été pensé en conséquence et devient par là d'une créativité unique. On en vient presque à se dire qu'avec plus de moyens le film aurait perdu un peu de sa substance.


On regrettera juste de ne pas le voir sortir dans nos salles obscures tant il trouverait sans mal son public, un public de midnight movies, certes, mais qui n'est en rien négligeable dans le paysage culturel. En prenant, de plus, en compte son origine française, Némésis fait office d'OFNI qui aurait mérité de sortir il y a de cela trente ans. On en parlerait encore aujourd'hui comme d'une référence. Je garde espoir que ce sera bel et bien le cas dans autant de temps.

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le 5 avr. 2017

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Fosca

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