il y a quelques mois j'avais vu dans le même cinéma un docu de James Benning, nommé 13 lakes, où il avait posé sa caméra au bord de 13 lacs américains différents, et les filmait chacun 10 minute, plan fixe, sans musique dialogue texte ni rien, et c'est tout. J'avais adoré l'expérience contemplative, le côté expérimental, et l'espèce de défi fait à ma propre ouverture d'esprit
ici j'ai un peu retrouvé la même chose. Chantal Akerman filme en plan fixe uniquement tout un tas d'endroits dans New York (et le plus souvent pas les coins qu'on a l'habitude de voir), avec pour seul autre accompagnement les lettres que sa mère lui envoyait alors qu'elle vivait donc à New York. elle les lit simplement, d'une voix lasse, et souvent le bruit des voitures new-yorkaises recouvre la lecture
j'y ai d'ailleurs vu là comme une réponse aux interrogations de la mère. à travers les lettres la mère s'étonne, s'inquiète et se plaint sans cesse que sa fille envoie trop peu de nouvelles. et c'est le dispositif du film qui apporte la réponse, qui donne le pourquoi ; c'est parce que chantal akerman est absorbée, recouverte, noyée, submergée par la ville, qu'elle n'entend plus sa mère (les bruits de la ville recouvrant la lecture des lettres )et qu'elle ne communique plus avec elle
et enfin, un dernier plan parmi les plus beaux que j'ai jamais vu, où depuis un ferry qui s'éloigne très lentement de la ville, cette dernière se dévoile de plus en plus à nous, toujours sans musique, sans rien, que ce plan fixe rendu dynamique par mouvement lent du ferry