A la découverte de Ni le ciel ni la terre, deux sentiments viennent rapidement s'entrechoquer : le plaisir certain, d'une part, ressenti devant l'audace formelle et les partis-pris de ce premier long-métrage de Clément Cogitore. La frustration, d'autre part, principalement causée par un programme très vite dévoilé, finalement rigide et peu propice au décrochage (pourtant longtemps pressenti) du récit comme de son spectateur.
En installant son dispositif à la frontière de l'Afghanistan et du Pakistan, à la suite du capitaine Bonassieu et de ses hommes, Cogitore semble d'abord proposer une alternative française à la duologie de Kathryn Bigelow Démineurs-Zero Dark Thirty, habile fausse piste constituée par une bataille contre une guerilla invisible et par l'habituelle confrontation avec l'Autre - ou la rencontre des occupants français et des villageois afghans. L'originalité du film réside dans son glissement soudain (mais sûrement trop rapide) de la logique du territoire (la terre) vers celle de la transcendance et des croyances (le ciel), dérivant de la guerre psychologique en surface vers un mystère souterrain où les soldats disparaissent et où, en vision nocturne, des fantômes apparaissent. Là où rien n'échappait à l'oeil totalitaire du sniper de Eastwood, les soldats de Cogitore fixent un point aveugle dans le désert.
Ce saut dans le fantastique qui n'est pas sans rappeler la démarche d'un Carpenter souffre du manque de temps laissé à la fiction pour dérailler, la faute à un scénario encore trop directif et lisible, lequel ne parvient jamais à lier complètement les deux pôles de sa recherche qui peinent alors à se transmettre leurs forces respectives.
Restent alors des scènes à la force quasi autonome : un dos tatoué se transmute en figure tribale le temps d'une danse, des fusées de détresse signalent la fin de la recherche et toujours ses silhouettes spectrales hantant la nuit soldatesque.
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