Deux thèmes se croisent dans Night Call : celui de l’information instantanée et celui de la personnalité particulière du personnage principal : « Lou ».
Night Call aborde le sujet de l’information prise sur le vif, le type même d’information que j’exècre ! Celle qui privilégie l’émotionnel, les images chocs qui sont livrées en pâture et qui ne bénéficient d’aucun recul, d’aucune contextualisation. Les gens, qui se laissent prendre, pensent voir la réalité, alors qu’ils sont manipulés. Nina, à qui Lou vend ses images l’exprime d’ailleurs clairement :
Les vols de voiture à Compton, ce n’est pas des nouvelles ça. Nos téléspectateurs préfèrent le crime urbain dans les banlieues. Donc, une ou des victimes, préférablement aisées et blanches, blessées par un pauvre ou une minorité.
Tout est dit ! Lou saisit très vite la règle du jeu, il devient expert en la matière au point même de créer l’événement.
Et c’est le deuxième sujet du film : la personnalité psychopathe de Lou. Son but et son unique but dans la vie, c’est de réussir et de gravir des échelons, mais des échelons qu’il a créés lui-même et qui ne dépendent pas des autres. Il est son propre patron et les autres sont des pions et des moyens pour atteindre ses objectifs personnels. Il est manifestement doté d’un QI très élevé. Il est autodidacte et possède une logique imparable. Mais au plan relationnel et émotionnel, le niveau est au-dessous de zéro… Il est incapable d’empathie et donc incapable de relation et de dialogue. Les gens sont pris au piège de sa logique et la communication ne fonctionne pas. Il n’en souffre pas, mais les autres, si. Tout est cérébralisé, planifié, contrôlé. Tout est vu aussi à partir de lui et de lui seul. Ainsi quand il explique à Nina qu’elle lui plaît et qu’il voudrait coucher avec elle, il fait pression sur elle en mettant en avant son travail et ses répercussions sur l’avancement de Nina. Coucher avec elle fait partie de la négociation et quand elle lui explique qu’un ami, comme il prétend l’être, ne force pas son amie à coucher avec lui, il lui rétorque : « Ce n’est pas vrai, Nina. Je suis sûr que tu sais ça, un ami est un cadeau qu’on se donne ». Donc lui et encore lui ! L’autre ne compte pas. De son côté, son assistant qu’il exploite complètement, l’apprendra au prix fort.
Jake Gyllenhaal est juste prodigieux dans ce rôle qui donne froid dans le dos. Comme les autres personnages qui l’approchent de près, on est dérouté et on reste bouche bée devant ses réactions, ses attitudes et ses actions jusqu’à la finale absolument glaçante.