Mommy

Le dernier film de Chantal Akerman, sort cette semaine. Film particulier forcément, puisqu'il est posthume. Elle s’est suicidée à l'âge de 65 ans, le 5 octobre dernier. Avec No Home Movie, la cinéaste belge nous livre un documentaire sur sa mère dans son appartement bruxellois. Forcément à première vue, c'est au bonheur des freudiens, un suicide, la mort, l'enfance. Même si le film n'est pas exempt de cette grille de lecture là, on oublie cette histoire morbide assez vite. Happé par la singularité de sa mère.
Le film s'attaque à un sujet peu traité au cinéma et oublié dans nos sociétés en général, le troisième âge.Âge où tout se réduit, la taille, la pigmentation des yeux, la respiration et l'espace de vie. Et c'est bien ça qu'elle filme, cet appartement. Celui-là même qu'elle ne quitte plus, que sa fille l'incite à délaisser un peu, pour faire une balade. C'est comme le plus petit atome de l'espace de vie. Il y a une certaine finitude du monde à la voir lire un magazine sur son fauteuil.

"Habité par la forme"
Chantal Akerman a toujours été une cinéaste qui a réinventé le cinéma. Elle ne se contente pas de porter un regard attendrissant sur sa mère comme font trop souvent les documentaires, elle habite l'appartement par la forme. Et cela de deux manières. La première c'est planter la caméra dans une pièce et laisser la machine inerte, les corps peuvent se déplacer elle ne suit pas les mouvements. Elle cadre la cuisine, le salon pas sa mère. Alors la pièce se remplit et elle se vide. C'est comme voir les planches sans la comédienne et puis avec le son de la comédienne et puis avec la moitié de la comédienne quand elle s'est arrêtée au bord. La dérision de sa présence au monde est interrogée. À quoi ça sert ? Toute une vie passée dans ce logement à piétiner, ranger, nettoyer s'ennuyer, et le monde qui bouge sans qu'elle ne s'en aperçoive.
La seconde c'est de filmer le soir, ou à contre-jour, caméra à l'épaule, de pièce en pièce. Comme pour trouver la sortie du labyrinthe, ou une activité intéressante, et se cogner contre les murs invariablement. Notre regard termine par buter plusieurs fois sur le transat vide étendu sur la pelouse que l'on aperçoit du balcon en contre bas.
Dans quoi est-elle enfermée? L'histoire tumultueuse du judaïsme et plus précisément des juifs polonais. L'histoire trop sage des femmes au foyer.

"Et par des obsessions"
Akerman ressort unenouvelle fois ses longs plans fixes, sur des chambres des salons, sa mère, pour réinterroger la condition des femmes. Mais ...

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