C’est porté par à la fois une consécration aux oscars et un bouche à oreille très favorable que Nomadland fait un joli bout de chemin en salle. Et pourtant, ce n’est pas le film le plus lol ni le plus facile du moment. On suit Fern, veuve sexagénaire qui a tout perdu lors de la crise de 2008. Pour survivre, elle suit les troupeaux de travailleurs précaires depuis les entrepôts d’Amazon jusqu’aux cuisines d’un resto en passant par l’entretient d’un camping, à travers l’ouest américain. Un voyage envoûtant de bout en bout. C’est une micro-intrigue que l’on tient là. Plutôt une chronique en fait. Dans ces bouts de dialogues et ces plans larges sur des paysages à couper le souffle, Nomadland dit tout de ces travailleurs pauvres et rattache cette froide réalité américaine aux origine des Etats-Unis. Ces nomades rappellent beaucoup les settlers de la conquête de l’ouest. Beaucoup d’espoir et bien peu de satisfaction. Le personnage de Fern a le courage de vivre une vie difficile et elle met de la sincérité dans tous ses rapports aux autres, en particulier avec les autres vagabonds. La description de cette communauté de valeurs met en avant la solidarité nécessaire quand on vit en dehors de la société de consommation. Au final, c’est toute l’histoire des States qui défile en suivant la route démantibulée du van de Fern. Autour d’elle, une nature grandiose qui rappelle les plaisirs simples du frisson frais et de la lumière qui réchauffe et du toucher rugueux des arbres. On l’aura compris, ce sont tous nos sens qui sont conviés dans ce road-movie âpre et profondément humain. La mise en scène est ample et laisse de la place à toutes les évasions. Elle nous autorise à plonger dans nos propres réflexions sans jamais nous faire perdre le fil. Dès lors, le film se déroule aussi bien sur l’écran que dans nos têtes, la plus grande des salles de ciné. A l’interprétation, Frances McDormand excelle comme jamais et démontre une fois de plus par un simple sourire ou un tout petit geste du quotidien toute l’étendue de son talent. Assurément un grand film d’aujourd’hui et une merveilleuse suite des Désaxés de John Huston. L’histoire continue.

Konika0
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Konika0 - Vus ou revus en 2021. et Les plus belles claques esthétiques

Créée

le 1 août 2021

Critique lue 46 fois

1 j'aime

Konika0

Écrit par

Critique lue 46 fois

1

D'autres avis sur Nomadland

Nomadland
Moizi
5

Oh la zolie carte postale

Il y a de belles images, bien soignées, ça pourrait faire de belles cartes postales ? Mais après ? Parce qu'en vrai voir un film sur des déclassés aux États-Unis, tentant de se persuader qu'ils ne...

le 10 juin 2021

124 j'aime

10

Nomadland
Sergent_Pepper
7

Wander woman

Alors que Chloé Zhao s’attachait jusqu’ici à des communautés plutôt circonscrites pour évoquer l’identité ou la précarité, son nouveau film prend une ampleur à l’échelle nationale : la femme incarnée...

le 9 juin 2021

82 j'aime

10

Nomadland
Behind_the_Mask
8

Prendre la route pour ne plus jamais la rendre

La situation économique, le sentiment de communauté, les grands espaces tour à tour opulents et désolés. Aucun doute, il s'agit bien là d'un portrait en creux des Etats-Unis d'Amérique et de leur...

le 29 juin 2021

64 j'aime

4

Du même critique

Calmos
Konika0
7

Barbmos

Le hasard fait succéder Calmos à Barbie. Mais le hasard n’existe pas, diront certains. Et réellement, on tient là un concept bien plus porteur que le Barbenheimer supposé condenser toutes les...

le 5 août 2023

6 j'aime

2

Bowling Saturne
Konika0
2

Commissaire Moulin contre les chasseurs masculinistes

Ce sont le synopsis mystérieux, l’affiche idoine et le succès critique qui m’ont amené à lancer le film. Que de vile tromperie dans ce monde. Ils sont deux frangins. L’un est commissaire de police et...

le 21 mai 2023

6 j'aime

L'Antre de la folie
Konika0
7

Un autre Carpenter

D’une certaine manière, L’Antre de la Folie occupe une place un peu spéciale dans la filmo de Carpenter. Il a quelque chose de différent et c’est ce qui m’a donné envie de le revoir. Un auteur à...

le 11 sept. 2021

5 j'aime