Le film est bon, et même assez parfait, mais un peu trop "comme il faut". Je chipote, mais disons que le réalisme fait un peu figure, ici, d'académisme. Pour aller vite, je n'aime pas du tout les scènes avec le grand-père qui cueille les fruits à l'ancienne dans son verger paisible avec ses gestes lents (j'ai envie de dire : mon oeil) ; ni celles où l'on m'explique que la famille est unie malgré les épreuves, que le moment passé ensemble est de qualité, ou que l'ambiance est bonne envers et contre tout (on dirait Klapisch). Toute la première partie est un peu trop posée (voire poseuse) et pas assez vivante pour que je la traverse avec mes propres perceptions. La réalisatrice me demande de comprendre son film, et non de le voir. Ce n'est pas le cas dans Y aura-t-il de la neige à Noël, Les Merveilles ni La Cienaga, qui sont certainement les grands modèles de Nos Soleils.
Et puis ça s'améliore. Peu à peu, le film se débarrasse de sa prudence, il se défait de sa première esthétique et tente d'élaborer des scènes plus narratives, qui sont tout de suite énigmatiques, incertaines et vibrantes. C'est bon signe pour cette réalisatrice, qui fera sûrement de belles choses par la suite. En attendant il y a ce Nos Soleils, un peu tiède au préalable mais finalement assez âpre, très touchant à force de creuser la piste d'une défaite à laquelle un homme ne se résout pas, pourtant inévitable, entraînant avec lui, vers la catastrophe évidente, toute sa famille, et notamment son pauvre fils qui lui est si fidèle, beau personnage transi de peur à l'idée de perdre l'amour de son père.