Après quelques voyages en Europe, Andreï Tarkovski décide, en 1982, de définitivement quitter l'URSS et part alors en Italie où il coécrit et met en scène Nostalghia. Il y raconte l'histoire d'un poète russe parti en Italie, accompagné par une jeune interprète, faire des recherches sur un compatriote compositeur.
Malgré deux récentes déceptions avec le cinéma de Tarkovski, je gardais une immense estime pour ce cinéaste, notamment grâce à des œuvres comme Andreï Roublev ou Solaris, mais je ne m'attendais pas à une telle claque avec Nostalghia. Je retrouve ce qui m'a plu dans d'autres de ses œuvres, à savoir une grande richesse, tant dans l'écriture que dans la mise en scène mais aussi une atmosphère hypnotique, fascinante et magnifique. On entre dans son oeuvre dès les premières secondes et la sublime scène d'ouverture pour n'en sortir que fasciné et interrogé par une oeuvre à part, unique et mystérieuse.
Se déroulant en Italie, on comprend assez vite le titre où Tarkovski semble déjà nostalgique de sa terre natale et laisse tout le long planer un soupçon de mélancolie sur son récit. Autour de ce personnage poète, on retrouve les interrogations, parfois tout en symbolisme, que le cinéaste a souvent fait apparaître dans ses œuvres, autour de la vie, de la place de l'homme sur la terre, ce qu'il doit en faire ou encore la mort et les divers sentiments. D'une richesse incroyable, il brasse ses thèmes avec subtilité, créant ainsi une poésie presque fantastique, d'une incroyable beauté. Les personnages sont là aussi très bien écrits, tout comme les relations qu'ils vont développer, servant à merveille les thématiques et l'atmosphère que Tarkovski met en place.
Tarkovski prend son temps et livre une oeuvre contemplative dans laquelle il nous immerge dès les premières secondes grâce à la mise en place d'une atmosphère aussi fascinante que mystérieuse qui va prendre de plus en plus d'ampleur, mais aussi de puissance et notamment émotionnelle, plus on avance dans le récit. Il déborde d'idées, notamment dans la mise en scène mais aussi les magnifiques séquences oniriques où on a l'impression d'être au coeur du récit et aux côtés des personnages. Esthétiquement magnifique, Tarkovski use très bien de divers éléments (brume, inclusion de la couleur dans les scènes en noir et blanc etc) et sublime les paysages, donnant lieu à des scènes magistrales, fortes et mémorables. Devant la caméra, Oleg Yankovsky bénéficie de l'excellente direction du metteur en scène de Solaris et retranscrit très bien tout le désespoir et les interrogations de son personnage, tout comme la relation qu'il entretient avec sa traductrice.
Rarement je n'ai, à ce point, été subjugué et fasciné par une oeuvre. Entre mélancolie, poésie et mystère, Tarkovski, pour son premier film après son exil de sa terre natale, livre une grande et magnifique oeuvre, hypnotique et inoubliable, que je ne manquerais pas de revoir pour essayer d'en cerner tous les contours et la richesse.