6 ans après avoir délaissé Orlando Bloom et la pétillante Kirsten Dunst, amoureux fous, au détour d'une fête foraine, Cameron Crowe est de retour derrière la caméra avec We bought a zoo. Traduit Nouveau Départ sur les affiches françaises, c'est pourtant bien le Cameron Crowe d'Elizabethtown que l'on reconnait dans ce drame familial, traité avec la légèreté et le talent d'écriture qui lui correspondent. We bought a zoo n'a pas la verve d'un Jerry Maguire, ni la folie douce des Rencontres à Elizabethtown, mais un charme fou se dégage de son récit. Un film touchant et sincère qui séduit le spectateur.

La vie réserve parfois bien des surprises. Journaliste aventuriste, Benjamin Mee était préparé à tout, sauf au pire. Six mois après la disparition de sa femme, il gère tant bien que mal sa petite famille, son deuil et son frère. Dépassé, allant même jusqu'à choisir pour conseillère sa fille de 5 ans, mais décidé à prendre un nouveau départ pour une nouvelle vie (ça sonne un peu comme une émission de M6, nan ?), il jette son dévolu sur un zoo menacé d'extinction. Commence alors une nouvelle aventure... accompagnée de la magnifique partition de Jónsi (chanteur de Sigur Rós).

La perte, et le chemin à parcourir pour surmonter cette épreuve : un sujet apprécié de Cameron Crowe. Il aime reprendre à ses protagonistes ce qu'ils chérissent le plus pour les pousser vers une remise en question nécessaire, sur les chemins d'un parcours initiatique. La perte d'un job, d'un proche, ou même d'un amour. Ici, il cumule. Adapté des mémoires d'un certain Benjamin Mee, le réalisateur s'accorde la liberté de largement romancer son histoire, et d'y ajouter une vision plus personnelle sur le deuil, la relation père/fils, ou encore l'humain.

Des thèmes récurrents dans le cinéma de Crowe. On retrouve ici tous les ingrédients qui faisaient déjà recette dans son Elizabethtown. Des personnages secondaires de façade, pas toujours travaillés en profondeur, mais décalés, qui permettent une psychologie plus poussée du protagoniste. Des dialogues bien ficelés, laissant trainer quelques répliques mémorables. Une histoire hors du commun, tout comme les multiples épreuves qui se dressent contre elle. Mais heureusement, tout se règle au bon moment, comme si l'auteur cherchait à nous faire prier, pour finalement voir nos vœux exaucés. Il nous donne à voir ce qu'on espère, jouant ainsi la séduction avec le spectateur.

Un jeu pas toujours fin. Tout semble calculé pour décocher la précieuse première larme, celle qui entrainera les autres dans sa chute. Mais malgré l'évidence des procédés, Crowe y parvient, touchant nos cœurs de spectateur, jusqu'à en perdre notre objectivité critique. Au-delà du sentimentalisme exacerbé qui l'anime, il est habité d'une profonde humanité et d'une émouvante sincérité. Et on ressent un questionnement permanent sur le sujet abordé, bien plus grave qu'en apparence.

Si le titre suggère que ce nouveau départ s'apparente à l'achat irréfléchi d'un zoo malade, il passe avant tout par l'acceptation d'un passé révolu. Benjamin Mee fuit le deuil de sa femme, se réfugie dans le déni. Il s'abandonne dans le regard noisette de sa petite dernière, essayant de lui conserver cette enfance que la vie tend à lui arracher trop tôt. Mais il sera lui-même rattrapé, et contraint d'affronter toutes ces choses et endroits qui lui rappellent son amour éteint. Une thérapie opérée en douceur, à grand coup de bons sentiments, de flashbacks et ralentis, et de larmes. Néanmoins, Crowe raconte le drame familial sans trop l'apitoyer. A la manière d'un feel good movie, il varie le ton entre moments délicats et franches rigolades.

Un humour qui découle de personnages attachants. Un frère comptable légèrement porté sur la chose et pas toujours de bon conseil, un personnel de zoo doux-dingue, un inspecteur complétement délirant... Une palette de personnalités décalées et un casting bien trouvé. Si on retrouve Matt Damon comme on l'a laissé dans Au-Delà et Contagion, l'investissement en plus, la petite Rosie Mee, jouée par Maggie Elisabeth Jones (nom à retenir) irradie le film par son intelligente naïveté et son sourire cabotin. Quant à Scarlett, elle garde son minois charmeur.

Au début, on est un peu comme les visiteurs du zoo, curieux de voir si l'entreprise valait le détour. Un pitch sympathique et original mais servi par un réalisateur qui peine à trouver son public. Puis on se laisse emporter. Les notes de Jónsi, ce récit extraordinaire, l'envie d'accompagner cette famille, en pleine reconstruction, dans l'aventure... On oublie l'évidence d'une émotion dictée volontairement débordante , pour être finalement touché par le charme de cette histoire, moins inspirée que Rencontres à Elisabethtown certes, mais tout aussi rafraichissante.
Cinexclu
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le 22 févr. 2012

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