Exception faite des scènes d’action dans lesquelles Jimenez excelle, Novembre a les défauts de La French sans les qualités de Bac Nord. C’est un film dans lequel le réalisateur nous demande de lui faire confiance quant à l’itinéraire proposé sans nous dire où il va. Beaucoup d’éléments sont laissés dans l’ombre, à commencer, fâcheux, par la fonction des personnages secondaires dont on ne saura qu’au générique qui ils étaient.
Ne pas prendre le spectateur pour un con c’est bien mais un peu d’explication ne nuit pas. Alors qu’il abonde en détail sur des plaques d’immatriculations, la mise en place d’une souricière aurait mérité mieux que sa découverte en un plan cut. Admettons.
Jimenez s’est piégé en voulant s’autoriser de la fiction sur un sujet dont il se sent moralement et légitimement tenu de coller au plus près de la véracité des faits. Ce qui nous donne la témoin voilée (qui ne l’était pas en réalité), mais des personnages emprisonnés dans leur désir de bien faire.
Il y a, je l’ai dit, des scènes d’actions remarquables (l’ouverture, l’assaut final) mais aussi de suspens (la scène dans la cité, décor que Jimenez semble affectionner) ainsi que la très bien menée fausse piste du dealer (mention spéciale à Anaïs Demoustier cousine de Pauline Étienne du Bureau des Légendes, plus intéressante qu’une Kiberlain qui fait du Léa Drucker).
Néanmoins, dans un scénar plus travaillé, la scène d’ouverture en Grèce digne de Homeland aurait pu donner lieu à un Dujardin avide de revanche au lieu de quoi la suite n’accouche ni d’un rappel ni de l’envie d’éviter de se planter de nouveau, juste du boulot-boulot dans des circonstances plus compliquées que la moyenne. Circonstances relatées dont la tension dramatique est , de mon point de vue, loin de transcrire la tension et l’effroi qui avaient été les nôtres lors de ces attentats sans précédent. Idem le Gouvernement est absent alors qu’on suppose que les pressions et demandes de résultat devaient être quelque peu constantes.
En fait, le défaut principal de Novembre est d’avoir réduit ses personnages à des archétypes prisonniers de leur cahier des charges. Les seuls qui s’en sortent étant les rôles secondaires.
Fidèle dans sa volonté de transcrire le « On n’avait pas le temps » qui semblait être le moto des services de Police et de renseignement durant ces quelques jours, le film s’impose un rythme soutenu mais de manière si littérale qu’on ressort du film à bout de souffle au prix d’une narration qui s’est délestée de tous ses atours en chemin, réduite à sa seule expression de déroulé linéaire. Ajoutons à cela une telle avalanche d'information qu'on a finalement le sentiment que l'enquête enchaîne les allants de soi.
Novembre reste cependant un film à voir, qui satisfera beaucoup et ne choquera personne (ce n’était pas son propos) tout en étant lucide sur l’étendue de l’islamisme en France et en Belgique notamment mais qui n’aura pas osé s’affranchir du légitime respect dû aux protagonistes pour acquérir une dimension cinématographique qui lui aurait conféré une meilleur postérité, à tout le moins d’épaisseur.
* Époque de la sortie du film, quand cette critique a été originellement publiée sur une autre plateforme